Julio Ribera

J’apprends avec une profonde tristesse le décès de Julio Ribera à l’âge de 91 ans.

J’ai découvert son travail quand j’avais moins de 10 ans, dans l’Histoire de France en bande dessinée de Larousse. Je l’avais tout de suite repéré au milieu de tous les génies du dessin réaliste qui ont participé à cette anthologie. J’avais été particulièrement frappé par son épisode sur les croisades de Saint Louis. Il s’en dégageait quelque chose de profondément sombre et désespéré.

Je me souviens du jour où je suis tombé, à la bibliothèque de mon collège, sur le tome 1 du Vagabond des limbes. Le coup de cœur graphique immédiat. J’avais reconnu le dessinateur de l’Histoire de France sous les ors de la science-fiction. Je l’avais lu immédiatement et n’avais absolument rien compris. Mais j’étais totalement fasciné. Je l’ai emprunté et réemprunté parce que ce livre m’hypnotisait. Je n’ai jamais cessé d’admirer son travail depuis.

Je me souviens de notre première rencontre, avec son épouse. Un petit festival dans les montagnes, disparu depuis, mais où Valérie et moi avions découvert un couple absolument merveilleux. Et un homme incroyablement sage et bon, qui masquait modestement tout cela derrière un simple sourire.

Je me souviens de la lecture de Montserrat, son premier album autobiographique, où j’ai compris en partie d’où venait le sentiment de grande profondeur que je ressentais en sa présence.

Je me souviens d’avoir sorti ses albums il y a une semaine au journaliste de France 3 venu m’interviewer pour l’exposition vaisseaux spatiaux des Rendez-Vous de la Bande Dessinée d’Amiens. Je lui ai dit que c’était une des séries majeures du space opera, si ce n’est la série majeure. Et je me réjouissais d’avoir des planches d’Universal War One exposées au côté de celles du Vagabond des limbes dans cette exposition. Et j’attendais bien sûr d’y voir Julio et son épouse.

J’ai appris vendredi soir que Julio était en soins palliatifs à l’hôpital. Ne pouvant espérer lui rendre visite vu la distance, je me suis dit que j’allais lui dessiner une petite carte et lui envoyer par la poste. Pour lui dire une dernière fois toute mon admiration pour son travail et toute mon amitié pour lui. J’allais faire cela ce dimanche matin…

Merci Julio pour tous ces merveilleux souvenirs.

 

Avec toute mon affection à sa compagne et aux siens.

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La jungle et le zoo

Vous savez, vous devez vraiment décider où vous voulez vivre, si vous voulez vivre dans la jungle ou dans le zoo.

Si vous désirez la beauté, si vous voulez la liberté, la jungle est votre monde. Mais bien sûr, vous y êtes en danger, vous devez vivre avec des serpents, des requins, des tigres, des putois, vous savez, des moustiques et des sangsues.

Si vous voulez être en sécurité, vous devez vivre dans le zoo. Vous y êtes protégé. Si vous êtes un agneau, vous savez que le tigre ne vous attaquera pas. Vous savez que vous aurez un petit quelque chose à manger tous les jours ; c’est très bien. Vous devez travailler dur, mais vous vivez à l’abri derrière les barreaux. Et ce qui est merveilleux, c’est que de derrière ces barreaux vous rêvez de la beauté de la jungle. […]

Vous serez surpris du nombre de personnes qui préfèrent vivre dans le zoo. Ils ne sont pas prêts à payer le prix de la liberté. Ils pensent que la liberté doit être, en quelque sorte, obtenue sans effort, et même offerte, ce qui n’est jamais le cas, jamais.

Miloš Forman

Citation extraite (et traduite comme je le pouvais) d’une passionnante interview de 1997 disponible sur le site de la George Washington University :


Mise à jour

Je n’avais pas fait le lien avec la chanson Dans la jungle ou dans le zoo de Jean Ferrat, ni avec l’album du même nom paru en 1991. Cela aurait pu pourtant me faire comprendre qu’initialement cette métaphore parlait du capitalisme (la jungle) et du communisme (le zoo). Alors que je n’y avais vu qu’un questionnement sur la soumission dans notre société de consommation très organisée… Comme quoi…

Michel Chapuis

J’apprends le décès du grand organiste Michel Chapuis. Son intégrale de Bach, éditée chez Valois, m’a accompagné depuis l’enfance. J’ai aussi découvert grâce à ses enregistrements bien d’autres merveilles. En particulier tout un répertoire français pour orgue du XVIIe et XVIIIe siècle que Michel Chapuis, en très grand connaisseur de la facture d’orgue et de son histoire comme en fin lecteur des partitions anciennes, avait su ressusciter. J’avoue que j’ai un gros coup de mélancolie ce soir…

Michel Plessix

J’apprends à l’instant le décès de Michel Plessix, un des auteurs de Bande Dessinée qui m’avait accueilli les bras ouverts dans ce métier. J’étais impressionné par le professionnel, l’homme était devenu un vrai ami. Durant ces 25 ans, j’ai toujours eu un grand plaisir à le voir et le revoir. On était toujours du club des auteurs qui se couchaient trop tard en festival…

Valérie et moi nous disions justement il n’y a pas très longtemps qu’on devrait prendre le temps de rendre visite à Michel et quelques autres amis qui habitent dans la même ville, histoire de refaire le monde autour d’un verre…

Michel, tu nous manques déjà.

 

En 2006, au festival de Soliès

Martin Landau

L’acteur Martin Landau est décédé hier. Il restera avant tout pour moi le commandant Koenig da la base lunaire Alpha dans la magnifique série des Anderson “Cosmos 1999”, vue gamin, planqué derrière le canapé tellement ça m’impressionnait.

Quand le festival BD d’Amiens m’avait proposé au début des 2000 de rendre un hommage dessiné à une série de mon enfance, j’avais fait un Goldorak et un Cosmos 1999 sans hésiter. Ce sont les toutes premières doses de science-fiction que j’ai reçues enfant, et elles m’ont rendu accro à vie. Quel plaisir ce fût de dessiner les vaisseau Eagles et le couple mythique de Barbara Bain et Martin Landau.

Je repense à leurs rôles dans “Mission : Impossible”. Je repense aussi à ceux de Martin dans “la Mort aux trousses” d’Hitchcock, dans “Cléopâtre”, dans un “Columbo”… Je repense enfin à la prodigieuse émotion qu’il avait su mettre dans le vieux Bela Lugosi du film “Ed Wood”. Je repense à la dimension qu’il avait su donner à la mort du vénérable acteur à la fois oublié et prodigieusement ancré dans les mémoires. Cette scène prend, hélas, un nouveau sens aujourd’hui.

Windsor McCay à Cherbourg

Nous étions hier soir à l’inauguration de la grande exposition Windsor McCay à Cherbourg pour la biennale da la Bande Dessinée 2017. Cette exposition est une pure merveille ! Rien que les nombreux originaux de Little Nemo, accompagnés des pages de journaux d’époque, méritent le déplacement. Et ils sont entourés de nombreuses autres planches, dessins, projections de dessins animés…

On sait que Windsor McCay est le génie américain de la bande dessinée et du dessin animé du début du XXe siècle. J’avais beau bien connaître son travail, je le regarde depuis hier soir encore différemment. Une expérience à ne pas manquer, donc !

Mention spéciale pour la scénographie impeccable des commissaires de l’exposition, les amis François Schuiten et Benoit Peeters. Vous aurez le plaisir d’entendre ce dernier vous présenter en video la vie et l’œuvre de McKay.

Vous l’aurez compris, je vous recommande chaudement de vous rendre à Cherbourg d’ici fin septembre. Vous en profiterez pour admirer la très belle collection de peinture et de sculpture du Musée Thomas-Henry ou se trouve l’exposition, et pour visiter le beau Cotentin si vous ne le connaissez pas encore.

 

De gauche à droite Daria Schmitt, Fabrice Neaud, Benoit Peeters, votre serviteur et Valérie Mangin.
Photo de Martin Zeller.

Hommage à Uderzo

Cette année, beaucoup de dessinateurs se sont passés le mot de réaliser un petit dessin pour l’anniversaire d’Albert Uderzo. J’ai toujours dit toute l’admiration que j’ai pour le dessin du créateur d’Asterix, ne serait pour son incroyable sens de la dynamique et de la vie. J’ai donc pris quelques minutes pour m’essayer à l’exercice.

 

Bernie Wrightson

Bernie Wrightson est décédé. C’était bien sûr le monstre sacré de la Bande Dessinée et de l’Illustration que tous les amateurs connaissent. Mais j’ai un rapport très particulier avec son travail.

Bernie Wrightson, Barry Windsor-Smith (son ami du “Studio”) et François Schuiten étaient les trois grandes influences de mon dessin entre 16 et 20 ans, quand j’encrais encore en style “gravure à l’ancienne”… L’admiration de Wrightson fait partie de ce qui nous a rapproché aux Arts déco, Mathieu Lauffray et moi, et nous a amené à créer ensuite notre “Studio” nous aussi. Étrangement, c’est ce que m’a appris Mathieu qui m’a fait abandonner ce style “gravure”. Mais le travail de Wrightson a été si important dans ma vie artistique que j’ai aujourd’hui le sentiment douloureux de perdre un de mes maîtres.

Je n’aurai jamais pu vous remercier de vive voix, Bernie Wrightson. Qu’importe. Mais que j’aimerai qu’il y ait un paradis des artistes ou vous seriez accueillis, bras ouverts, par Gustave Doré et Jeffrey Catherine Jones…

Prix extraordinaire

J’ai reçu le Prix extraordinaire des Utopiales 2016. Ce grand prix du plus beau festival de Science-fiction de France (voire de l’univers connu) me touche évidemment beaucoup. En particulier parce que cette année il en a été décerné deux, et que je me suis retrouvé au côté de l’immense Gérard Klein. Auteur et éditeur en effet extraordinaire, son travail m’a fait découvrir, entre autres merveilles, Dune de Frank Herbert, la saga romanesque qui a le plus marqué mon adolescence. J’étais donc très très très ému. Et je le suis encore en écrivant ces mots deux jours plus tard.. Merci à toute l’équipe des Utopiales de m’avoir fait cet honneur et cet immense plaisir !

 

Machines à Dessiner

Une vraie pépite, François Schuiten filmé pendant la réalisation de l’affiche de l’exposition Machines à Dessiner qui a lieu en ce moment même au Musée des Arts et Métiers. Je ne l’ai jamais caché, j’admire son travail depuis longtemps. Pendant l’adolescence, lui et Benoit Peeters m’ont redonné goût à la Bande Dessinée franco-belge avec La Fièvre d’Urbicande et La Tour. Merci à eux !