Le Blog

Victores illuminati

Allez, on va aider les complotistes en panne d’imagination.

PS : Merci à Yacine Ait Kaci pour l’inspiration. Et je prie Adobe de m’excuser pour avoir maltraité Photoshop à ce point. Franchement, c’est pas si facile de faire tout pourri comme il faut !

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Réflexion en creux

Moi aussi, j’ai découvert très tardivement le “C” caché en défonce dans le logo de Carrefour. Sur un mur Facebook, je vois tout le monde en conclure que, vraiment, le graphiste de ce logo est très mauvais.

Pourtant, ce logo reste parfaitement identifiable et remplit les fonctions essentielles de reconnaissance de la marque. Il y a une élégance à ne pas être immédiatement compréhensible qui est probablement très volontaire vu le moment ou ce logo a été conçu. Au milieu des années 60, on croyait plus que jamais au progrès de l’humanité. Et on osait lui offrir de la complexité.

Aujourd’hui, à l’inverse, les “communicants” pensent que l’humanité est constituée de cons et s’adaptent à la situation, voire travaillent à exploiter la bêtise au maximum. Que nous pensions aujourd’hui que le C caché du logo Carrefour est dû à un problème d’incompétence d’un graphiste au lieu d’y voir de la subtilité est bien le reflet de l’utilitarisme vulgarisé de notre époque.

Bref, nous nous jugeons nous-mêmes quand nous croyons juger le passé.

Les pouvoirs exceptionnels du président

Quand un président de gauche s’autorise à maintenir la France sous état d’urgence pendant vingt mois, que se permettra un président d’extrême droite au prochain gros attentat ou au prochain conflit social d’ampleur ? Tout ce qu’il voudra, vu que la constitution lui offre un joli petit article 16 pour imposer la dictature. Pour ceux qui ne serait pas encore au courant, je vous recommande de lire ce papier aussi modéré qu’officiel sur le sujet, il y a déjà de quoi avoir des sueurs froides.

Les pouvoirs exceptionnels du Président

Les pouvoirs exceptionnels du Président ou “pouvoirs de crise” ont été définis par l’article 16 de la Constitution de la Ve République. Ils trouvent leur origine dans le souvenir de la défaite de juin 1940, marquée par la grande faiblesse du pouvoir exécutif, alors impuissant à résister à l’invasion allemande. D’après de nombreux témoignages, le général de Gaulle aurait été convaincu, dès cette époque, de la nécessité de permettre au chef de l’État de se saisir de pouvoirs exceptionnels en cas de crise majeure. Son retour au pouvoir en 1958 et la rédaction d’une nouvelle Constitution lui ont donné l’occasion de mettre en application ce projet.

Les conditions de mise en œuvre

Le principe est que le président de la République prend les mesures exigées par les circonstances en cas de crise. Mais, cette compétence est soumise à des conditions de fond et de forme.

Les deux premières conditions de fond sont cumulatives. Il faut, d’une part, que les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux de la France soient menacées de manière grave et immédiate. Il faut, d’autre part, que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics soit interrompu. Une fois ces conditions réunies, le Président peut prendre les mesures qui s’imposent. Mais, et c’est la troisième condition, ces mesures doivent avoir pour objectif d’assurer aux pouvoirs publics, dans les plus brefs délais, les moyens d’accomplir leur mission.

À cela s’ajoutent plusieurs conditions de forme. Le Président de la République doit d’abord consulter officiellement le Premier ministre, le président de chacune des deux assemblées et le Conseil constitutionnel. Ensuite, il doit informer le pays de la mise en œuvre de l’article 16. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel doit être consulté au sujet de chacune des mesures prises par le Président dans ce cadre. Le Parlement se réunit de plein droit et l’Assemblée nationale ne peut être dissoute durant la période de mise en œuvre des pouvoirs exceptionnels. En outre, le Président ne peut réviser la Constitution, ce qui est implicitement contenu dans l’article 16 qui ne lui accorde des pouvoirs que pour rétablir “… les pouvoirs publics constitutionnels”. L’article 89 sur la révision de la Constitution précise, quant à lui, qu’« aucune procédure de révision ne peut être engagée ou poursuivie lorsqu’il est porté atteinte à l’intégrité du territoire ».

Une disposition critiquée

Lors de la présentation du texte constitutionnel, des voix se sont élevées contre l’article 16 jugé “liberticide”. Sa mise en œuvre – unique jusqu’à aujourd’hui – du 23 avril au 29 septembre 1961 a également suscité des critiques.

C’est à la suite du putsch de quatre généraux en Algérie que le général de Gaulle a décidé d’utiliser ses pouvoirs de crise. Or, quelques jours à peine après la mise en œuvre de l’article 16, les pouvoirs publics avaient retrouvé un fonctionnement normal. La durée de son application a donc été abusivement prolongée. La majeure partie de la période a en fait été utilisée par le président de la République pour créer les outils lui permettant d’assurer le retour de l’ordre en Algérie (par exemple, la mise en place de tribunaux d’exception).

De plus, la décision de recourir à l’article 16 et les actes législatifs pris par le président pendant sa mise en œuvre ne font l’objet d’aucun contrôle juridictionnel. Dans un arrêt du 2 mars 1962 (arrêt Rubin de Servens), le Conseil d’État a noté que la décision présidentielle de mettre en œuvre l’article 16 était un “acte de gouvernement” (c’est-à-dire un acte insusceptible de recours juridictionnel). Il a également souligné qu’il ne pouvait être saisi que de recours contre des mesures relevant du domaine réglementaire. Dès lors, une mesure prise dans le cadre de l’article 16, relevant du domaine législatif, et violant les libertés fondamentales, ne peut être déférée au juge administratif.

Des propositions de réforme

C’est en raison de ces insuffisances que le système de l’article 16 a souvent fait l’objet de propositions de réformes.

Ainsi, le Programme commun de la gauche, signé en 1972, prévoyait la suppression de cette disposition. En revanche, elle ne figurait pas parmi les 110 propositions de François Mitterrand en 1981. Pourtant, lorsque le Gouvernement Bérégovoy, en 1993, déposa un projet de réforme constitutionnelle sur le bureau du Sénat, l’abrogation de l’article 16 était prévue, mais la réforme n’a pas abouti en raison du changement de majorité parlementaire.

Enfin, de manière plus nuancée, et probablement plus réaliste, la “Commission Vedel” réunie par François Mitterrand en 1992, fit une intéressante proposition. En effet, il lui paraissait indispensable de de prévoir le terme de la période d’application de l’article 16, afin d’éviter un exercice abusivement long de cette disposition. Le président était le seul à pouvoir demander au Conseil constitutionnel de constater que les conditions d’application des pouvoirs de crise ne sont plus réunies. La Commission Vedel proposait que le président du Sénat et celui de l’Assemblée nationale puissent également, par une demande conjointe, saisir le Conseil aux mêmes fins.

La réforme de 2008

La loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 reprend la proposition du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par Édouard Balladur. Il instaure un contrôle démocratique sur la durée de l’application de l’article 16 qui ne peut plus être le “fait du prince” , ce qui permet aussi d’atténuer fortement le caractère éventuellement “liberticide” que lui reprochaient ses adversaires. Désormais, après trente jours d’application, le Conseil constitutionnel, saisi par le président d’une des deux assemblées ou par soixante députés ou sénateurs, doit se prononcer par un avis public pour examiner si les conditions d’application des pouvoirs de crise sont toujours réunies. Le Conseil se prononce de plein droit au terme de soixante jours d’exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà.www.vie-publique.fr

Hommage à Uderzo

Cette année, beaucoup de dessinateurs se sont passés le mot de réaliser un petit dessin pour l’anniversaire d’Albert Uderzo. J’ai toujours dit toute l’admiration que j’ai pour le dessin du créateur d’Asterix, ne serait pour son incroyable sens de la dynamique et de la vie. J’ai donc pris quelques minutes pour m’essayer à l’exercice.

 

MacPaint en direct du passé

Je me souviens avoir eu la chance de toucher assez vite un Mac peu après sa sortie en 1984. J’étais totalement fasciné par la souris, l’interface graphique menu/fenêtre, le fait qu’on pouvait imprimer ce qu’on avait à l’écran tel quel… du jamais vu à l’époque ! Et je me souviens d’avoir essayé de dessiner sur MacPaint, et d’avoir trouvé ça génial (ah ah ah). Le site archive.org propose une émulation en javascript de ce premier outil de dessin à la souris, je vous laisse tenter votre chance

Premier festival du livre de Bayeux

Le week-end du 22/23 avril se tiendra “Les passeurs d’encre”, la première édition du festival du livre de la Ville de Bayeux. Une quarantaine d’auteurs de littérature et de bande dessinée seront là pour vous rencontrer dans la belle salle de la Comète, tout près de la gare.

Entre autres nombreuses activités, vous pourrez tout le week-end visiter une petite exposition consacrée à mon travail. Je vous recommande aussi de venir dimanche à 11h à la rencontre de Valérie Mangin qui vous expliquera comment elle écrit ses scénarios. Enfin, à 15h, ce sera à mon tour de vous montrer comment je dessine sur ordinateur. Nous signerons (sans dessin) tous les deux nos livres à ceux qui viendront à ces rencontres. Et aux autres aussi, car nous ne sommes pas méchants 🙂

L’entrée est gratuite, alors venez nombreux soutenir cette première édition du festival du livre de Bayeux, c’est important, sa pérennité en dépend !

L’auteur et le traducteur, demain

Pour commencer, merci au Centre national du livre de nous avoir invités à parler de l’avenir des auteurs dans leur Amphithéâtre du Salon du livre de Paris. Je vais essayer de vous faire un petit résumé (trop) rapide, et de surtout vous faire partager le fond de ce que j’ai pu dire sur scène.

Marie Sellier, présidente de la Société des Gens de Lettres, a rappelé avec précision la situation actuelle et les évolutions déjà en cours, en soulignant que la situation des auteurs du livre, dans leur ensemble, se précarise de plus en plus. Elle a présenté le Guide des auteurs 2017 co-édité par le CNL, la Fill et la SGDL, dont je ne peux que vous recommander la lecture.

Jörn Cambreleng, traducteur et directeur du CITL, a parlé avec beaucoup de pertinence des intelligences artificielles en train d’apparaître, entre autres, chez Google Traduction, et de leur capacité à remplacer les traducteurs pour les tâches les plus simples. Il ne leur restera alors que les tâches les plus hautes, tel que traduire de la poésie, de la grande littérature ou de l’humour. Mais ce sera les priver de tout un travail élémentaire et surtout alimentaire qui est indispensable à la plupart pour survivre.

Quant à moi, j’ai évidemment parlé des évolutions récentes de la Bande Dessinée. J’ai rappelé que les auteurs de BD étaient, pour la plupart, des professionnels à plein temps, ce qui n’est pas le cas dans la littérature, mais que l’effondrement des revenus était en train de bouleverser cette donne, en particulier à cause de l’explosion du nombre de publications. J’ai essayé d’élargir nos questionnements à tous les auteurs, rappelant qu’on avait rêvé un monde où tous les humains seraient des créateurs et que, grâce à la révolution numérique, cela devenait une réalité. Tous ces nouveaux outils ont mis des artisanats très complexes à la portée de plus en plus de gens : le synthétiseur et le home studio en musique, les logiciels d’assistance à l’écriture en littérature et la tablette graphique, le lettrage informatique et le scan pour la BD. Dans un même temps, le numérique, la mondialisation et le transfert d’une partie de la fabrication vers l’auteur (manuscrit déjà saisi en traitement de texte par les romanciers, scans faits par les dessinateurs, fichiers livrés clef en main par les coloristes…) ont beaucoup fait chuter le prix de publication d’un livre. Cette facilité d’accès à la création pour tout un chacun et cette baisse des coûts de publication expliquent, en bonne partie, l’explosion du nombre d’auteurs, d’éditeurs et de publications que ce soit dans la BD ou le livre en général.

Il n’y a aucune raison que ce mouvement ralentisse à court terme. Mais cette profusion, qui est dans l’absolu une excellent nouvelle pour la liberté de création, empêche, de plus en plus souvent, que des longues carrières se mettent en place. Le candidat créateur, passé l’apprentissage, produit quelques œuvres, mais elles sont le plus souvent totalement noyées dans le flot continu des autres productions. Il devient de plus en plus inenvisageable d’en tirer un revenu. Au bout de quelques années, l’auteur craque sous les difficultés économiques et le manque de reconnaissance, et abandonne toute idée de devenir professionnel, de se consacrer à plein temps à son art. Et c’est là qu’est, à mon avis, le plus grand risque. Bien sûr, il y aura toujours des génies spontanés ou des succès immédiats. Mais la majorité des créateurs ont besoin de beaucoup de temps pour s’accomplir, pour atteindre cette richesse et cette maturité qui font une œuvre. Et on sait à quel point c’est vrai avec la Bande Dessinée qui nécessite un plein temps (voire plusieurs) si on veut livrer un livre tous les ans. SI on continue, seuls les auteurs de best-sellers instantanés et les riches rentiers pourront consacrer leur vie à leur Art. C’est un retour en arrière incroyable, et cet élan démocratique qui nous rêvait tous en créateurs laissera place à un monde créatif aux mains de quelques rares auteurs sortis de la cuisse de Jupiter régnant au-dessus de la horde des créateurs du dimanche invisibilisés.

J’ai fini sur un appel à l’État et aux politiques, puisque le CNL qui nous recevait est le « bras armé » du Ministère de la Culture pour le livre. Le pouvoir politique avait su proposer, en son temps, la loi sur le prix unique du livre afin de maintenir l’existence des petites librairies face aux risques que leur faisait courir la grande distribution. Le pouvoir politique, en cette période électorale, doit comprendre l’urgence de mettre en place des solutions pour protéger les revenus des auteurs. Autrement, dans les prochaines décennies, à l’image de ce que connaît aujourd’hui la presse d’information, le livre connaîtra une catastrophe économique et créative qui participera, elle aussi, à la destruction de notre démocratie.

Merci à Claire Darfeuille pour le grand sérieux avec lequel elle a préparé et modéré ce débat. Et merci à Aymeric Seassau pour la photo.

Bernie Wrightson

Bernie Wrightson est décédé. C’était bien sûr le monstre sacré de la Bande Dessinée et de l’Illustration que tous les amateurs connaissent. Mais j’ai un rapport très particulier avec son travail.

Bernie Wrightson, Barry Windsor-Smith (son ami du “Studio”) et François Schuiten étaient les trois grandes influences de mon dessin entre 16 et 20 ans, quand j’encrais encore en style “gravure à l’ancienne”… L’admiration de Wrightson fait partie de ce qui nous a rapproché aux Arts déco, Mathieu Lauffray et moi, et nous a amené à créer ensuite notre “Studio” nous aussi. Étrangement, c’est ce que m’a appris Mathieu qui m’a fait abandonner ce style “gravure”. Mais le travail de Wrightson a été si important dans ma vie artistique que j’ai aujourd’hui le sentiment douloureux de perdre un de mes maîtres.

Je n’aurai jamais pu vous remercier de vive voix, Bernie Wrightson. Qu’importe. Mais que j’aimerai qu’il y ait un paradis des artistes ou vous seriez accueillis, bras ouverts, par Gustave Doré et Jeffrey Catherine Jones…