Au Collège de France

Si on m’avait dit qu’un jour je serais convié à m’exprimer dans l’enceinte du Collège de France, je n’y aurai pas cru. Je suis pourtant bien invité par Benoît Peeters à dire quelques mots durant le colloque qui conclut son année de cours sur la Bande Dessinée. Et il n’y a pas que l’institution qui est prestigieuse, je serai en excellente compagnie comme vous pouvez le voir dans le programme ci-dessous.

Pour ceux qui peuvent se rendre disponibles, les conférences sont en accès libre et sans inscription préalable. Pour les autres, l’ensemble du colloque sera filmé et sera disponible ensuite sur le site du Collège de France.

D’ici là, vous pouvez déjà réécoutez les passionnants cours de Benoit en ligne.

COLLOQUE : NOUVEAUX CHEMINS DE LA BANDE DESSINÉE

7 juin 2023 de 9h à 18h

Collège de France , amphithéâtre Marguerite de Navarre

Le projet de ce colloque est d’établir un état des lieux de la bande dessinée dans le monde francophone, sous les angles plus divers. On s’intéressera bien sûr à la dimension esthétique, en évoquant la bande dessinée de poésie, la place grandissante de la non-fiction, l’intérêt pour les nouveaux supports. Mais on évoquera aussi la situation de l’enseignement et de la recherche, les évolutions du marché, la diversité des approches éditoriales, la fragilité des auteurs et autrices, l’importance de la médiation, la mise en valeur du patrimoine et des planches originales…

 

  • 09 h 15 Benoît Peeters : Introduction
  • 09 h 30 Jan Baetens (auteur) : Une bande dessinée de poésie
  • 10 h 15 David Vandermeulen (auteur) : La bande dessinée de non-fiction
  • 11 h 00 Julien Baudry (université Bordeaux Montaigne) : Au-delà du papier, vers le numérique
  • 11 h 45 TABLE RONDE : La recherche et l’enseignement de la bande dessinée. Avec Thierry Groensteen (auteur), Irène Leroy-Ladurie (revue Neuvième art), Sylvain Lesage (université de Lille)
  • 12 h 40 Pause
  • 14 h 00 Xavier Guilbert (site Du9) : Les évolutions du marché
  • 14 h 30 TABLE RONDE : Éditer la bande dessinée. Avec Christel Hoolans (Kana – Le Lombard), Benoît Mouchart (Casterman), Serge Ewenczyk (Çà et là)
  • 15 h 20 TABLE RONDE : Auteurs et autrices, un métier en danger ? Avec Pierre Nocerino (chercheur), Loo Hui Phang (autrice), Denis Bajram (auteur)
  • 16 h 10 TABLE RONDE : Lire et faire lire la bande dessinée. Avec Vincent Poirier (libraire), Sonia Déchamps (journaliste-modératrice), Pascal Mériaux (BD Amiens)
  • 17 h 00 TABLE RONDE : Exposer et conserver la bande dessinée. Avec Anne-Hélène Hoog (CIBDI Angoulême), François Schuiten (auteur), Jean-Baptiste Barbier (galeriste)
  • 17 h 50 Benoît Peeters : Conclusion
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Arrêter aussi les séances de signatures ?

Ce week-end, Valérie et moi avons découvert pour la première fois les Imaginales. Quel merveilleux festival ! Consacré à l’imaginaire, il accueille tous les ans plus de 40 000 visiteurs dans un cadre idyllique, un parc au centre-ville d’Épinal. Différentes tentes et structures s’y dressent, et, avec une météo particulièrement idyllique comme cette année, c’est un vrai bonheur de circuler dans ce jardin enchanté.

Les Imaginales est un festival comme je les aime, un festival culturel à la fois grand public et pointu, et où, surtout, la dédicace n’est pas le seul centre d’intérêt. Vous le savez, j‘ai arrêté les séances de dédicaces dessinées il y a plus de quinze années, pour de nombreuses raisons, la première étant que je pensais, et pense toujours, qu’il y a de bien meilleurs moyens de montrer et parler de notre travail que des files de lecteurs devant des auteurs tête baissée sur leur dessin (voir ici). C’est pour cela que j’ai réorienté mes sorties vers les manifestations qui me proposaient autre chose que la séance de dédicace : tables rondes, démonstrations live, expositions, master class, cafés littéraires, ateliers et autres rencontres.

Ces dernières années, sous la pression de certains libraires, j’avais repris lentement le chemin des tables de dédicaces, mais dans une formule réduite à la seule signature de mes ouvrages. En ne faisant « que » signer, j’évitais les files d’attente de parfois plusieurs heures qui se formaient devant moi quand je dessinais. Et je pensais pouvoir discuter tranquillement avec ceux que ça intéresserait. Mais, dans les faits, il semble que seul un petit tiers des gens qui viennent devant moi ont envie de discuter. Les autres ne sont là que pour obtenir un autographe destiné à valoriser leurs livres de manière symbolique, mais aussi pécuniaire pour certains, je ne suis pas dupe.

Si j’avais accepté l’invitation des Imaginales (merci Gilles Francescano), c’était donc pour les tables rondes, les retrouvailles avec les amis et le fait qu’on m’avait dit que la rencontre avec le public était facilitée par le cadre. Et c’est bien le cas : j’ai été arrêté dans les allées du parc par de nombreux lecteurs et lectrices, et nous avons pu parler de plein de choses passionnantes. Entre autres excellents souvenirs, celui où, après une bonne sieste en fin de journée avec Valérie sous un des grands arbres un peu à l’écart, nous avons eu le plaisir de discuter avec un jeune libraire d’Octopus qui est venu, passionné, à notre rencontre. Je venais justement de poster sur mon mur Facebook une petite photo de cette sieste idyllique en souhaitant un bon week-end à tout le monde.

Hélas, en rentrant, j’ai eu le plaisir de découvrir sous ce message celui d’un malotru se plaignant de nous voir faire la sieste : « Au lieu de dédicacer… Triste 2 x 2 heures d’attente pour rien… Tant pis les autres auteurs ont fait le taf. »

Pourtant, nous avons été présents à tous les créneaux de signature que nous avions donnés au libraire dès le premier jour. Je suis juste arrivé un matin en retard d’une demi-heure car j’avais été occupé par une petite réunion professionnelle. Donc si ce monsieur a attendu deux fois deux heures pour rien, c’est qu’il n’a pas demandé aux libraires à quel moment nous venions. Mais cela ne semble pas être le cas, puisqu’il commente un peu plus bas « c’est le week-end qui a l’air d avoir été complexe selon les libraires… ».

J’ai du mal à croire que les libraires du pôle BD aient dit du mal dans mon dos, car ça serait plus que déplacé. J’imagine que ce monsieur s’est surtout fait un film. Car, sans doute, doit-il considérer qu’un auteur doit être à son service durant toute la durée d’un festival. Et il en est tellement persuadé qu’il a la goujaterie de venir le dire en commentaire sur mon propre mur.

Doit-on encore rappeler que le seul service que nous devons à nos lecteurs et lectrices, c’est de leur faire les meilleurs livres possibles ? Que la rencontre, la signature ou la dédicace dessinée sont des cadeaux gratuits que nous avons la gentillesse de leur faire ? Que nous prenons sur nos week-ends et nos vacances pour cela ? Et que nous avons donc peut-être le droit de faire une petite sieste ?

Bref. Suite à cette aventure, je commence à me dire qu’il serait plus simple que j’arrête toute séance de signature. Comme ça personne n’attendra devant une table vide. Je continuerai de voir mes lecteurs et lectrices à la fin des interventions sur scène, pendant les ateliers ou par hasard dans les allées. Je continuerai à y signer rapidement mes livres en souvenir de ces rencontres presque improvisées. Et tout le monde en sortira bien plus heureux, non ?

Rassurez-vous, cette petite histoire n’arrivera pas à gâcher l’excellent souvenir de ces Imaginales. Et même si c’est un peu trop loin de la maison, nous y retournerons Valérie et moi avec un grand plaisir… mais probablement sans signer la prochaine fois 😊

Compétitivité ?

J’entends ce matin sur France Culture la sociologue Gwenaële Rot expliquer que les producteurs internationaux de cinéma trouveraient la France « compétitive ». Entre autres explications, ce serait parce qu’il n’y a pas ici de syndicats puissants comme les « unions » aux USA. Pour preuve, en ce moment, la grève des scénaristes de la Writers Guild of America met tout Hollywood à l’arrêt. Au contraire, en France, les investisseurs n’ont pas à s’inquiéter de ce genre de fronde, vu qu’il est interdit aux syndicats de verrouiller l’accès à une profession comme le font les « unions » aux USA.

La « compétitivité » de la France sur le plan culturel c’est donc, entre autres, d’empêcher les auteurs et autrices de pouvoir réellement se défendre collectivement. Et quand nous disons aux élus ou au gouvernement que c’est, en conséquence, à l’État de nous protéger, on nous renvoie soit à la négociation contractuelle individuelle, dont on sait qu’elle n’est réellement possible que pour les quelques auteurs à succès, soit à la négociation collective dont le rapport Racine a démontré toute l’inévitable faiblesse vu les rapports de force actuels.

La « compétitivité » de la France sur le plan culturel c’est donc de maltraiter les auteurs et autrices. C’est donc de paupériser ceux qui sont au départ des œuvres audiovisuelles. Mais c’est, en même temps, de se demander pourquoi nos productions nationales s’exportent si mal et de regretter l’époque ou la culture française rayonnait à l’international. Sans réaliser qu’il y a peut-être là un lien de cause à effet.

En fait, la « compétitivité » de la France sur le plan culturel c’est d’avoir précarisé au maximum le département « recherche et développement » que sont les auteurs et autrices et de s’étonner, après, de se faire doubler par tous ceux qui continuent à investir dans l’avenir.

Auteurs & autrices de BD, la Ligue a besoin de vous

Bientôt, ce sont les élections au conseil de la Ligue des auteurs professionnels. L’excellent Frédéric Maupomé ayant présidé avec brio notre syndicat en se donnant à 1000% comme Samantha et moi l’avions fait auparavant, il a l’obligation maintenant de se reposer… enfin, de reprendre son travail d’auteur normal.

Je ne vais pas vous cacher que cela pose un problème côté bande dessinée. Je vais me retrouver seul à la représenter dans un conseil syndical de 14 membres. Je n’ai pas de doute que les autres seront à l’écoute de tout ce que je dirai, mais je ne suis ni disponible tout le temps ni, surtout, infaillible. Même si, depuis les États Généraux de la Bande Dessinée, je continue à être très attentif aux évolutions sociales, économiques, légales et technologiques qui nous concernent dans la BD, je pense que je ne dois pas être seul à parler pour les métiers de la BD à la Ligue.

Enfin, le conseil syndical de la ligue est surtout composé d’auteurs et d’autrices de textes. En fait, je suis le seul à y tenir un pinceau aujourd’hui. Il faudrait donc que dessinateurs, dessinatrices et coloristes se présentent à nos élections pour mieux veiller aux sujets qui les concernent en particulier.

Être au conseil, c’est bien sûr prenant, c’est la certitude d’ajouter des heures de travail à des semaines déjà trop courtes. En échange, c’est l’assurance de se sentir un peu plus utile aux autres dans un métier souvent trop individualiste. C’est aussi l’occasion de se former rapidement au droit d’auteur, aux complexités sociales et fiscales, mais aussi aux enjeux économiques et sociétaux à long terme de notre profession d’artiste-auteur. En vous engageant à la Ligue, vous aiderez donc surtout les autres, mais vous vous préparerez aussi à surmonter les difficultés de nos métiers

N’hésitez pas à venir discuter de votre éventuelle candidature en privé avec moi. Et si vous voulez commencer plus doucement, vous pouvez aussi rejoindre le rang de nos bénévoles actifs !

Est-ce aux pouvoirs publics de choisir les syndicats ?

Depuis la fondation de la Ligue des auteurs professionnels nous réclamons une démocratie sociale digne de ce nom pour les artistes-auteurs. Et on en est loin.

En effet, fin février, le ministère de la Culture organisait une réunion pour préparer le prochain cycle de négociation entre auteurs et éditeurs. Au moins deux organisations syndicales qui souhaitent pourtant participer aux négociations n’étaient pas conviées : côté auteurs le CAAP, Comité Pluridisciplinaire des Artistes-Auteurs·trices, et côté éditeurs la FEDEI, Fédération des éditions indépendantes.

Le CAAP est pourtant en pointe depuis des années dans la défense des artistes-auteurs, et a en parallèle été nommé, faute d’élection, par ce même ministère au conseil d’administration de la Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs.

Le CAAP ne s’est pas démonté, et s’est présenté à la réunion avec un commissaire de justice (un huissier) pour faire constater l’entrave aux libertés syndicales. Malgré cela, on lui en a interdit l’entrée. Va-t-il falloir à nouveau retourner devant la justice ? Rappelons que le CAAP et la Ligue ont déjà dû assigner le ministère de la Culture devant le Conseil d’État pour que le droit français transcrive correctement la « rémunération appropriée et proportionnelle » obligatoire au niveau européen1.

Bref, voici ce qui se passe lorsqu’il n’y a pas de d’élections professionnelles : ce ne sont pas les artistes-auteurs eux-mêmes, mais les pouvoirs publics qui décident qui a le droit ou pas de représenter… les artistes-auteurs. Est-ce cela la démocratie sociale ?

Cher ministère de la Culture, doit-on encore une fois vous citer le rapport Bruno Racine2 ?

En proposant un calendrier de mise en œuvre de ses recommandations, la mission souligne que certaines de ces mesures conditionnent les autres. Il s’agit en effet :

– de renforcer les artistes-auteurs collectivement, par l’organisation rapide d’élections professionnelles qui permettront de donner corps et légitimité au Conseil national des artistes-auteurs à créer afin de servir de cadre à la négociation collective avec les diffuseurs.

Notes

Un an de BD au Collège de France

Depuis octobre 2022, le Collège de France consacre à la Bande Dessinée un cycle de cours, de séminaires et de colloques sous la direction de Benoît Peeters. Pour ceux qui l’ignoreraient, le Collège de France, c’est le graal de la reconnaissance intellectuelle et universitaire.
En octobre 2020, dans le cadre de l’Année de la BD, la vénérable institution avait demandé à Benoît Peeters d’organiser une journée sur le 9e Art. Benoît est évidemment un des scénaristes, historiens et théoriciens les plus respectés de la BD, mais a aussi animé à nos côtés les États généraux de la Bande Dessinée qui ont provoqué, entre autres, le rapport Lungheretti et cette Année de la BD 2020.
Deux ans plus tard, le Collège de France a décidé d’aller plus loin et de confier à Benoît la chaire Création artistique. Cours, séminaires, colloques, c’est un très riche ensemble qui nous est proposé durant toute cette année académique 2022-2023.

J’avoue que Valérie et moi regrettons bien de ne plus habiter Paris pour aller écouter de vive voix notre ami Benoît. Heureusement, l’ensemble des cours du Collège de France sont en ligne, en vidéo et en podcast. Je vous ai mis les principaux liens déjà disponibles ci dessous.

Ce cycle se conclura le 7 juin par le colloque Nouveaux chemins de la bande dessinée. J’ai l’honneur d’être dans les intervenants conviés par Benoît Peeters. Si l’on m’avait dit un jour que j’irais dire quelques mots sur la scène du Collège de France… Merci Benoît !

 

 

 

Auteurs : professionnels précaires, retraités précaires

On aurait pu croire que la réforme des retraites allait, au moins, profiter aux plus petites pensions. Mais il devient très clair que bien peu sont concernées par la fameuse hausse à 1200 euros annoncée par le gouvernement. En gros, si vous avez une carrière incomplète, si vous avez travaillé à temps partiel ou si vous avez été sans emploi un temps, vous ne ferez pas parti des « veinards ». Quand c’est BFMTV qui l’écrit, et non l’Humanité, on commence à savoir à quel point cette réforme coûtera beaucoup à tous sans vraiment profiter aux plus faibles.

Qu’en est-il pour les auteurs et autrices ? Avec l’absence de tout contrat de travail comme de l’assurance chômage, leurs carrières sont souvent en dents de scie. Dans le milieu de la Bande Dessinée, elles ont en plus du mal à démarrer réellement avant 25 ans… Avec des cotisations en vrac, on peut donc imaginer ce qui attend les auteurs à la retraite.

On pourrait se dire qu’heureusement, dans la création artistique, on ne prend jamais réellement sa retraite, et qu’on peut cumuler des revenus de la création avec sa mauvaise pension. Ce serait penser que la plupart des artistes-auteurs sont encore au travail à 64 ans. Hélas, si on continue à créer en général jusqu’à sa mort, il est très dur de rester toute sa vie professionnel au sens d’en tirer des revenus suffisants. Suffisant ne serait-ce que pour acquérir par ce biais des trimestres de retraite.

Pour la BD, l’étude des États généraux de la Bande Dessinée de 2016 a montré cette entrée tardive dans le métier mais aussi une éviction précoce à partir de 50 ans. Dans les faits, je vois bien que la plupart de mes jeunes collègues des années 90 ont dû changer de métier depuis. Le succès est déjà rare dans nos pratiques, mais conserver un succès plusieurs décennies confine au véritable miracle. La plupart des auteurs gagnant moins que le SMIC mensuel ils finissent, à un moment, par craquer et se réfugient, s’ils le peuvent, dans un métier moins précaire. Ceux qui restent n’ont plus qu’à prier pour ne pas être ringardisés et remplacés par de jeunes entrants toujours plus nombreux et souvent moins chers…

On le voit, être artiste-auteur aujourd’hui, c’est la promesse pour la très grande majorité d’être des professionnels précaires. Et c’est la certitude derrière cela d’en payer le prix durant la retraite. Cette précarité n’est pas l’apanage des créateurs. Elle se répand dans toute notre société au fur et à mesure que le salariat est remplacé par l’indépendance. Combien de millions de Français sont-ils condamnés au minimum vieillesse ? Il est vraiment urgent de penser une réforme des retraites qui permettra à toutes et tous de vieillir dans la dignité. Et pour cela de repenser un marché du travail qui permettra à toutes et tous de travailler et de cotiser dans la dignité.

Mémoire des prix

Source : facebook.com

L’ami Fred Beltran écrit sur Facebook qu’il doit se résoudre à se débarrasser de vieux Macintoshs pourtant acquis à prix d’or à l’époque. Que de souvenirs. En me remémorant le PowerMac qu’on avait acheté à deux avec Mathieu Lauffray, hors de prix pour de jeunes artistes débutants, j’ai donc commenté que ces ordinateurs « coûtaient un rein ». Mais certains me répondent que « ça n’a pas vraiment changé aujourd’hui ». Rien de moins sûr.

Sur la publicité d’époque, on peut voir le prix de la gamme des Macintoshs de 1994.

Si on convertit en euros les 20 000 Francs HT d’un PowerMac 7100, en tenant compte de l’inflation évidemment, on obtient presque 5 000 € HT / 6 000 € TTC d’aujourd’hui. Ce PowerMac 7100 de 1994 à 6 000 € a en gros comme équivalent dans la gamme aujourd’hui le Mac Mini M2 ”pro” à 1 500 €. C’est donc 4 fois moins cher. En performance, c’est évidemment sans comparaison.

Pour rappel, les tarifs du Mac Mini M2 de 2023 commencent à 700 € (et c’est déjà une sacrée bête de course à ce prix). Même le Mac Studio Ultra, horriblement cher, n’est « que » à 4 500 €.

Bref, les prix des PC comme des Mac se sont totalement effondrés en 30 ans à gamme égale. Et c’est vrai pour la plupart des appareils électroniques. Et ce sans tenir compte des prodigieux gains de performance obtenus entre temps. Et pourtant beaucoup continuent à les trouver bien trop chers.

On ne peut donc que recommander de comparer les prix dans le temps, car notre mémoire est très approximative sur ces sujets. Je pratique souvent cet exercice, et c’est plus surprenant qu’on ne l’imaginerait. Je le fais bien sûr aussi sur la rémunération des auteurs et autrices dans l’édition. Et croyez-moi, avec une vision de plus de 30 ans de recul sur les tarifs pratiqués, il y a de quoi avoir peur.

Pour faire des calculs des prix avec l’inflation mais aussi la conversion entre francs et euros entre les années :

Soutien à actualitte.com et aux salariés d’Éditis

Si vous êtes un habitué de mon blog, vous connaissez le site ActuaLitté, ne serait-ce par ce qu’il a souvent parlé dans ses colonnes de tous les problèmes des auteurs et autrices. Depuis 15 ans, actualitte.com informe sur tout ce qui concerne le livre, que ce soit sur les plans éditoriaux, littéraires, artistiques, économiques, sociaux, techniques, historiques et futurs…

Aujourd’hui, la direction d’Editis fait pression pour que soient supprimés des articles qui révèlent un climat social problématique dans le groupe d’édition de Vincent Bolloré. Il y a des problèmes ? On s’en prend au messager !

Voici une bien étrange vision de la liberté d’informer en démocratie. Les grandes entreprises ou les puissants décideraient-ils donc de ce qu’on a le droit de dire sur eux ? On ne peut que soutenir les équipes d’ActuaLitté dans leur volonté d’indépendance. Et espérer que les salariés d’Editis mécontents seront entendus.

Arnaque aux images libres de droits

Vous croyez que vous pouvez illustrer tranquillement vos publications avec des images « Creative Commons » trouvées sur des sites Internet qui proposent des illustrations a priori libres de droits ? Eh bien, méfiez-vous, vous pourriez vous retrouver à devoir payer des milliers d’euros malgré votre bonne foi.

Des petits malins ont trouvé un filon pour piéger en toute légalité un maximum d’internautes. Les licences « Creative Commons » qui accompagnent les images qu’ils mettent à disposition du public sont en effet complétées avec des mentions très particulières (faire un rétrolien vers le site d’origine par exemple). Si vous ne respectez pas à la lettre ces petites lignes dans la licence, ça devient un usage illégal de l’image. Et les infractions au droit d’auteur, c’est grave.

Surtout, ne vous croyez pas protégé par la taille gigantesque d’Internet. Il n’y a rien de plus simple pour des robots que de parcourir tranquillement les sites web pour retrouver des images. Ces robots dédiés à rechercher vos éventuels « abus » finiront par les retrouver et vous enverrons immédiatement une facture salée. On parle souvent de plusieurs milliers d’euros !

Pire, il semblerait que certains fournisseurs d’images « gratuites » modifient leur licence au bout de quelques années, et partent ensuite à la recherche des « abus » qu’ils ont eux-mêmes favorisés. Comment pourrez-vous prouver, aujourd’hui, qu’une image avait une licence différente autorisant cet usage au moment où vous l’avez mise sur votre site ? L’arnaque est réelle mais est difficile à prouver !

Vous êtes prévenu. Les images libres de droit ne sont que rarement totalement libre d’usage. Et même sur des sites très connus, vous prenez un risque important dans la durée.

 

PS: Et voilà qui va pousser encore plus de gens vers les IA de génération d’images…

 

 

 

 


Mise à jour

Un intéressant commentaire de Mathieu Salvia, scénariste ET juriste spécialisé en propriété intellectuelle :

Complétement d’accord, mais je voudrais juste tempérer un peu les “risques” réels encourus. Pour commencer, je préciserai que cette situation n’est pas nouvelle. Dans ma carrière précédente, en tant qu’avocat, j’en ai traitée un certain nombre, y compris pour des auteurs qui avaient reçu des lettres de ce genre. Aujourd’hui, je deal avec ces plateformes et leurs CGV obscures tous les jours, et force est de constater que rien n’a réellement changé.

Ensuite, il faut garder en tête que parce que lorsqu’on est un particulier/consommateur ou même jusqu’à un certain point, un indépendant, on risque en réalité très peu de choses dans ce genre de situations (en tout cas rarement des milliers d’euros). Surtout si l’usage qu’on fait de l’image litigeuse s’est limité à un site ou à un blog, avec peu de fréquentation. Tout simplement parce qu’en droit d’auteur, en France, avant d’obtenir quelque chose de manière forcée, il faut passer par le juge, démontrer qu’on a bien les droits sur l’image (souvent tricky), la réalité de l’infraction, la réalité et le quantum du préjudice (c’est souvent ici que le gâteau se dégonfle dramatiquement) et le fait que le contrat (les CGV) était légal, et a bien été violé. Ouf. Il faut aussi comprendre que ce genre de procédure judiciaire prend de 12 à 18 mois et coûte finalement bien plus en frais de procédure et honoraires d’avocat que ce qui est réclamé par les ayant droits (le montant des D&I en France doit être proportionnel à l’atteinte).

Il y a d’autres barrages légaux qui jouent : notamment le fait qu’un particulier/consommateur sera considéré comme une partie faible au contrat et à ce titre, bénéficiera d’une plus grande protection. Un parallèle un peu similaire pourra être dressé pour les indépendants, n’exerçant pas dans un métier du droit. Le droit de la consommation s’ajoute alors au droit de la PI pour protéger les consommateurs des “pièges” tendus par les CGV et tout type de contrats d’adhésions similaire (mentions obligatoires, clauses interdites, acceptation expresse par le consommateur, lisibilité des CGV etc.). Lorsque les CGV ne sont pas claires, ou déceptives, elles ne peuvent servir à justifier une faute contractuelle (je vais vite, mais je me rends compte que je suis en train de créer une véritable tartine que peu de gens liront 🙂)

Enfin, j’ajouterai que si c’est l’auteur original de l’image qui réclame un dédommagement, il y aura, dans certains cas, la possibilité pour le particulier/consommateur ou l’indépendant, de se retourner contre la plateforme / ou de l’appeler en garantie.

Il ne faut aussi pas oublier que les avocats qui enverront la Cease and Desist letter chercheront toujours à taper les poches pleines (les plateformes) plutôt que celles d’un particulier ou d’un indépendant. En face d’un refus persistant, ils finissent souvent par… laisser tomber, sans suite.

Ceci étant, il faut bien évidemment TOUJOURS lire les termes des CGV, SURTOUT lorsque le contenu est soi disant gratuit. Si ce n’est pas clair, ou si la plateforme s’arroge le droit d’en changer les termes quand elle le souhaite, alors il vaut mieux renoncer et passer son chemin.