Vous croyez que vous pouvez illustrer tranquillement vos publications avec des images « Creative Commons » trouvées sur des sites Internet qui proposent des illustrations a priori libres de droits ? Eh bien, méfiez-vous, vous pourriez vous retrouver à devoir payer des milliers d’euros malgré votre bonne foi.
Des petits malins ont trouvé un filon pour piéger en toute légalité un maximum d’internautes. Les licences « Creative Commons » qui accompagnent les images qu’ils mettent à disposition du public sont en effet complétées avec des mentions très particulières (faire un rétrolien vers le site d’origine par exemple). Si vous ne respectez pas à la lettre ces petites lignes dans la licence, ça devient un usage illégal de l’image. Et les infractions au droit d’auteur, c’est grave.
Surtout, ne vous croyez pas protégé par la taille gigantesque d’Internet. Il n’y a rien de plus simple pour des robots que de parcourir tranquillement les sites web pour retrouver des images. Ces robots dédiés à rechercher vos éventuels « abus » finiront par les retrouver et vous enverrons immédiatement une facture salée. On parle souvent de plusieurs milliers d’euros !
Pire, il semblerait que certains fournisseurs d’images « gratuites » modifient leur licence au bout de quelques années, et partent ensuite à la recherche des « abus » qu’ils ont eux-mêmes favorisés. Comment pourrez-vous prouver, aujourd’hui, qu’une image avait une licence différente autorisant cet usage au moment où vous l’avez mise sur votre site ? L’arnaque est réelle mais est difficile à prouver !
Vous êtes prévenu. Les images libres de droit ne sont que rarement totalement libre d’usage. Et même sur des sites très connus, vous prenez un risque important dans la durée.
PS: Et voilà qui va pousser encore plus de gens vers les IA de génération d’images…
Mise à jour
Un intéressant commentaire de Mathieu Salvia, scénariste ET juriste spécialisé en propriété intellectuelle :
Complétement d’accord, mais je voudrais juste tempérer un peu les “risques” réels encourus. Pour commencer, je préciserai que cette situation n’est pas nouvelle. Dans ma carrière précédente, en tant qu’avocat, j’en ai traitée un certain nombre, y compris pour des auteurs qui avaient reçu des lettres de ce genre. Aujourd’hui, je deal avec ces plateformes et leurs CGV obscures tous les jours, et force est de constater que rien n’a réellement changé.
Ensuite, il faut garder en tête que parce que lorsqu’on est un particulier/consommateur ou même jusqu’à un certain point, un indépendant, on risque en réalité très peu de choses dans ce genre de situations (en tout cas rarement des milliers d’euros). Surtout si l’usage qu’on fait de l’image litigeuse s’est limité à un site ou à un blog, avec peu de fréquentation. Tout simplement parce qu’en droit d’auteur, en France, avant d’obtenir quelque chose de manière forcée, il faut passer par le juge, démontrer qu’on a bien les droits sur l’image (souvent tricky), la réalité de l’infraction, la réalité et le quantum du préjudice (c’est souvent ici que le gâteau se dégonfle dramatiquement) et le fait que le contrat (les CGV) était légal, et a bien été violé. Ouf. Il faut aussi comprendre que ce genre de procédure judiciaire prend de 12 à 18 mois et coûte finalement bien plus en frais de procédure et honoraires d’avocat que ce qui est réclamé par les ayant droits (le montant des D&I en France doit être proportionnel à l’atteinte).
Il y a d’autres barrages légaux qui jouent : notamment le fait qu’un particulier/consommateur sera considéré comme une partie faible au contrat et à ce titre, bénéficiera d’une plus grande protection. Un parallèle un peu similaire pourra être dressé pour les indépendants, n’exerçant pas dans un métier du droit. Le droit de la consommation s’ajoute alors au droit de la PI pour protéger les consommateurs des “pièges” tendus par les CGV et tout type de contrats d’adhésions similaire (mentions obligatoires, clauses interdites, acceptation expresse par le consommateur, lisibilité des CGV etc.). Lorsque les CGV ne sont pas claires, ou déceptives, elles ne peuvent servir à justifier une faute contractuelle (je vais vite, mais je me rends compte que je suis en train de créer une véritable tartine que peu de gens liront 🙂)
Enfin, j’ajouterai que si c’est l’auteur original de l’image qui réclame un dédommagement, il y aura, dans certains cas, la possibilité pour le particulier/consommateur ou l’indépendant, de se retourner contre la plateforme / ou de l’appeler en garantie.
Il ne faut aussi pas oublier que les avocats qui enverront la Cease and Desist letter chercheront toujours à taper les poches pleines (les plateformes) plutôt que celles d’un particulier ou d’un indépendant. En face d’un refus persistant, ils finissent souvent par… laisser tomber, sans suite.
Ceci étant, il faut bien évidemment TOUJOURS lire les termes des CGV, SURTOUT lorsque le contenu est soi disant gratuit. Si ce n’est pas clair, ou si la plateforme s’arroge le droit d’en changer les termes quand elle le souhaite, alors il vaut mieux renoncer et passer son chemin.