Librairie en danger à Bayeux

© Ouest France | Éric Marie

Une librairie n’est pas un commerce comme les autres. Si la loi Lang de 1981 n’avait pas imposé un prix unique pour les livres, les petits libraires auraient disparu depuis longtemps face aux coups de boutoir de la grande distribution. Malgré cela, ce commerce reste difficile. En tant qu’auteur, je peux vous dire que le livre rapporte bien peu à ceux qui en vivent… alors qu’il a tant à nous offrir.

Il ne faut jamais oublier que dans une ville, la librairie est un lieu fondamental pour la diffusion de la culture. Le libraire est un passeur. Il fait lire. Il fait circuler les idées. Il fait même souvent se rencontrer le public et les auteurs.

Lorsque le dernier libraire d’un centre ville ferme, c’est donc un sacré morceau de son âme qui meurt. C’est toute l’attractivité de ce centre ville qui s’en ressent.

Ce sont tous ceux pour qui la vie culturelle compte qui risquent de ne plus venir, voire de ne plus s’installer dans la cité.

Habitants de la Ville de Bayeux, mobilisons nous derrière Patricia et toute l’équipe du Préambule. Faisons l’effort de commander nos livres chez elles. Recommandons sa librairie à nos amis. Et espérons que notre municipalité comprendra qu’elle a aussi un rôle à jouer. Ce n’est pas quand notre centre ville aura dépéri qu’il faudra réagir, c’est maintenant !

Informatique et liberté

Notre premier ministre, avec la finesse d’un Georges Bush après le 11 septembre 2001, propose un joli projet liberticide pour nous défendre des terroristes. Un projet qui donne des moyens de surveillance hyper intrusifs à l’État, et particulièrement au pouvoir politique, avec un champ d’application tellement large qu’il peut concerner à peu près tout le monde. En tout cas, toute personne qui envisagerait de contester les décisions du pouvoir en place.

Superbe timing : Marine Le Pen et ses amis trouveront un arsenal tout prêt pour mettre en place un état policier si par malheur ils devaient emporter les élections en 2017.

Bulletin de santé

Depuis quelques mois, je parle très souvent des difficultés de plus en plus importantes que rencontrent les auteurs de Bande Dessinée pour vivre de leur travail.

Suite à quelques messages inquiets, je tiens à préciser à ma famille, mes amis et mes connaissances que je vais très bien ! Mais il est hors de question que, parce que je fais parti des hyper chanceux qui ont rencontré le succès, je ne soutienne pas totalement les plus démunis de mes confrères auteurs de BD. Surtout quand que les plus démunis, c’est maintenant la majorité d’entre eux !

J’ai connu cette misère, j’ai eu la chance d’en sortir en quelques années. Mais jamais je n’oublierai, et jamais je ne trouverai ça acceptable. Et merde à tous ceux qui ne le comprendraient pas, penseraient que c’est une pose ou me trouverait bien bête de penser aux autres…

Opportunité + instinct = profit

« Opportunité plus instinct égalent profit »… quelle jolie devise.

La grande qualité des séries TV Star Trek est d’avoir imposé une école “positiviste” dans la science-fiction. Là où souvent les auteurs de S.F. nous prédisent le pire pour essayer de nous l’éviter (j’en suis un parfait représentant avec UW1), Gene Roddenberry imagina un monde où les humains seraient devenus, si ce n’est parfaits, du moins franchement altruistes. Ils exploreraient l’univers pour le plaisir de la science et dans l’espoir de sympathiser avec toutes les races de l’univers. En 1966, alors que les USA connaissaient de terribles émeutes inter-raciales, que le Viet-nam tournait au cauchemar et que la guerre froide battait toujours son plein, c’est vers l’idéalisme que se tournait Star Trek.

Lorsque les scénaristes de Star Trek introduisirent les Ferengis dans la série 20 ans plus tard, tout laisse à penser que c’est les Américains des années 80 qu’ils avaient voulu caricaturer. La hiérarchie sociale des Ferengis est en effet celle qui prévaut aux USA : les plus riches en haut, les plus pauvres en bas. Pour s’assurer cette richesse, toute la société ferengie est basée sur le commerce et le profit, au point d’en avoir fait un code (a)moral auquel tous se réfèrent : les Règles d’Acquisition ferengies. Là où en France on croyait encore dans les années 80 à la valeur intellectuelle, culturelle ou personnelle des hommes, les USA de Reagan étaient eux déjà totalement vendus au profit.

Il y a quelque jours, en regardant un épisode de Star Trek DS9, j’ai entendu une règle d’acquisition ferengie qui résonnait particulièrement avec notre actualité : « Opportunité plus instinct égalent profit ». Opportunité et instinct. Voilà exactement la méthode de gouvernement de Nicolas Sarkozy. Cet homme sans culture intellectuelle, au point qu’il change d’opinion comme de chemise, sans culture classique, (jamais la France n’avait eu un président parlant aussi mal le français), à qui il ne reste qu’une forte personnalité, est en fait l’incarnation exacte de l’opportunisme et de l’instinct. Lorsqu’il s’impose dans la prise d’otage de Human Bomb à Neuilly. Lorsqu’il trahit Chirac pour le candidat donné gagnant Balladur. Lorsqu’il arrive à revenir en grâce auprès de Bernadette Chirac et se saisit finalement de l’UMP. Lorsqu’il se fait élire sur des promesses populistes. Lorsqu’il séduit les femmes les plus en vue. Un incroyable opportuniste, une bête d’instinct.

L’instinct n’étant pas raison, il fait d’incroyables bévues. Car, dès que se présente une opportunité, il ne peut s’empêcher de la saisir, quitte à détruire ce qu’il a construit la veille. Il ne connaît tellement que l’opportunisme et l’instinct qu’il les a imposés à son gouvernement comme méthode de gestion. Alors que la gestion, l’organisation, la planification que nécessite la “bonne gouvernance” sont l’exact opposé de l’opportunité et l’instinct… Prenons l’ouverture à gauche, par exemple : ce n’est pas une décision politique réfléchie, c’est juste des opportunités people à saisir. Voilà donc qui nous dirige. Et nous voyons où cela nous a en quelques mois amenés : au grand n’importe quoi, ou même la majorité ne comprend plus rien.

Ceci dit, je n’accuserai pas que Sarkozy. Il a été copieusement élu par les Français. Et c’est logique : nous nous américanisons jour après jour.

Nos enfants ne veulent plus devenir médecins, chercheurs ou ingénieurs comme dans les années 80 ; maintenant ils vont tous en école de commerce. Les seules classes de mathématiques dont on nous a parlé dans les medias depuis 20 ans sont celles de mathématiques financières. Les amis chartistes de ma femme sont tous en train de déprimer devant le désintérêt de plus en plus flagrant de la société pour la recherche universitaire et pour les vrais historiens. Mais, c’est vrai qu’il n’y a que peu d’opportunités à saisir dans le passé, juste des enseignements. Et même quand les medias nous parlent tous les matins de “développement durable”, c’est une preuve en soit : c’est qu’en vrai nous sommes tous devenus des opportunistes sans conscience des lendemains.

Pou finir : si j’en crois Star Trek, un Ferengi vendra son propre frère si l’opportunité est bonne, et si son instinct lui dit que c’est le bon jour. Alors, chers lecteurs, vous êtes prévenus : vous n’êtes plus qu’une source de profit potentiel pour les autres humains. Pour savoir à quelle sauce vos propres enfants vous mangeront, lisez donc les les Règles d’Acquisition Ferengies.