RAAP : Lettre ouverte à la Ministre de la Culture

Publiée ce jour par le Huffington Post.

Madame la Ministre,

Le temps est-il venu de nous dire adieu?

Depuis des années, sans bruit, sans révolte, nous survivons par passion pour notre métier, pour nos histoires et ceux qui les lisent, mais aujourd’hui, nous voyons notre fin approcher et nous refusons de nous y résigner.

En mars dernier, à l’occasion du Salon du Livre de Paris, le Conseil Permanent des Écrivains avait tiré la sonnette d’alarme, exposant de nombreux motifs d’inquiétude sur l’avenir immédiat de notre profession. À cela s’ajoute la paupérisation croissante qui frappe les auteurs, que ce soit au travers des baisses d’avances ou de pourcentages, ou par l’apparition de formules numériques illimitées qui ne rémunéreront personne, sinon les diffuseurs.

Alors qu’il semblait impossible d’aggraver davantage la situation, le RAAP vient de nous annoncer abruptement, par simple courrier et sans consultation d’aucune sorte, qu’à compter de janvier 2016 nous allions devoir cotiser à hauteur de 8% de nos revenus pour financer notre retraite complémentaire obligatoire. Actuellement les auteurs peuvent cotiser à cet organisme privé en ne versant qu’une cotisation minimale de 200 euros par an.

Madame, nous vous prions de considérer avec gravité cette dernière raison de notre juste colère autant que de notre dégoût. Dans quel autre métier inflige-t-on des baisses de revenus aussi importantes à des travailleurs déjà fragilisés? Des “travailleurs de l’esprit” qui ne bénéficient d’ailleurs pas des avantages que peut offrir le régime général (chômage, congés payés, 13e mois)…

Cette réforme soudaine et irréfléchie, les auteurs n’en veulent pas. Ils la rejettent au motif premier qu’elle est INACCEPTABLE autant qu’inapplicable.

Même si nous sommes évidemment favorables à un système solidaire des retraites, et ne sommes pas à ce titre opposés à une réforme juste, mesurée et concertée, croyez-vous que les auteurs pourront, en plus de leurs autres sacrifices, se priver de 8% de leurs revenus afin de s’acquitter de nouvelles cotisations sociales? Ceci représente l’équivalent de presque un mois de revenus, alors que la plupart d’entre eux ne gagnent pas assez pour payer des impôts et peinent à boucler leurs fins de mois. Nous vous rappelons, Madame la Ministre que le revenu de la moitié des auteurs de BD se situe (hélas) bien en dessous du SMIC. Il est urgent que cette réalité soit prise en compte, avant de réformer quoi que ce soit.

Depuis l’annonce de cette réforme, des auteurs, certains très précarisés, d’autres ayant vendu des centaines de milliers de livres, ont déclaré qu’ils abandonnaient le métier. Ils sont écœurés, fatigués et ne croient plus en des lendemains meilleurs alors qu’ils sont les premiers acteurs, et pourtant les plus mal lotis, de la chaîne du livre. Au rythme où vont les choses, leur exemple sera bientôt suivi par de nombreux confrères.

Dans un pays où le taux de chômage est croissant, nous créons notre propre emploi. Mieux, nous sommes à l’origine de milliers d’autres. Sur le plan économique, l’industrie culturelle est la quatrième plus rentable de France, comme votre ministère s’en est récemment enorgueilli. Sans parler de la vitrine qu’il représente à l’étranger, le marché du livre représente 80 000 emplois et 5,6 milliards d’euros. NOUS, AUTEURS, sommes à l’origine de cette richesse, de cette dynamique.

Nous demandons dès à présent la suspension de l’application de cette réforme et nous vous invitons à réfléchir et à faire réfléchir AVEC NOUS à la meilleure façon de conduire cette réforme de financement des retraites complémentaires pour qu’elle aille dans le sens d’un réel progrès social. La piste qui nous apparaît comme la plus évidente serait d’envisager un réel financement de la couverture sociale des auteurs par les acteurs de la chaîne du livre qui bénéficient le plus du travail de ces professionnels, comme c’est le cas dans d’autres domaines artistiques. À titre d’exemple, pour le RACD, les producteurs financent en partie la cotisation des auteurs, sans affecter le niveau des rémunérations nettes.

Notre lettre exprime les opinions majoritaires du monde de la bande dessinée, opinions partagées par bien des artistes et des écrivains avec qui nous comptons agir très prochainement.

Les auteurs signataires de cette lettre souhaitent, isolément ou à travers les représentants de leurs organisations professionnelles, engager une action de concertation constructive avec leurs interlocuteurs (Ministères concernés, RAAP, Agessa/MDA, SNE…), à partir du moment où des garanties d’écoute réciproque existent.

Dans le cas contraire, nous envisageons, dès septembre 2014, l’organisation d’actions collectives et médiatiques de blocage ou d’opposition par toutes les voies légales autorisées.

Les idées ne manquent pas. Après tout, c’est notre métier.

Les auteurs.

Liste des 748 signatraires

Gotlib Officier des Arts et Lettres, Chevalier de la Légion d’Honneur, Grand Prix d’Angoulême, Mad Award
Bilal Enki Grand Prix d’Angoulême
Tardi Jacques Grand Prix d’Angoulême, Eisner Awards
Margerin Frank Grand Prix d’Angoulême
Mezières Jean-Claude Grand Prix d’Angoulême
Loisel Régis Grand Prix d’Angoulême
Juillard André Grand Prix d’Angoulême
Veyron Martin Grand Prix d’Angoulême
Baru Grand Prix d’Angoulême
Goossens Daniel Grand Prix d’Angoulême
Cestac Florence Grand Prix d’Angoulême
Berberian Charles Grand Prix d’Angoulême, Inkpot Award
Dupuy Philippe Grand Prix d’Angoulême, Inkpot Award
Denis Jean-Claude Grand Prix d’Angoulême
Trondheim Lewis Chevalier des Arts et Lettres, Grand Prix d’Angoulême
Bagieu Pénélope Chevalier des Arts et Lettres
Blain Christophe Chevalier des Arts et Lettres
Ferri Jean-Yves Chevalier des Arts et Lettres
Geluck Philippe Chevalier des Arts et Lettres, Ordre de la Couronne de Monaco
Yslaire Chevalier des Arts et Lettres
Voutch Commandeur des Arts et Lettres
Sokal Benoit Chevalier des Arts et Lettres
Sattouf Riad César du meilleur premier Film, Prix du meilleur album d’Angoulême
Sfar Joann César du meilleur premier film, César du meilleur film d’animation
Marho Julie
Larcenet Manu
Rochette Jean-Marc
Alfred
Arleston Christophe
Rabaté Pascal
Bourgeon François
Petillon René
Blondieau Adeline
Davodeau Etienne
Jodorowsky Alejandro
Alex Alice
Guarnido Juanjo
Bajram Denis
Boulet
Chivard Yoan
Pedrosa Cyril
Fournier Jean-Claude
Tebo FredCoppée Thierry
Corbeyran Eric
De La Llave Tiburcio (Tito)
Convard Didier
Delafontaine Marc (Delaf)
Dubuc Maryse
Achdé
Dionnet Jean-Pierre
Dorison Xavier
Dufaux Jean
Oliveira Luiz Eduardo (Leo)
Vallée Sylvain
Nury Fabien
Lauffray Mathieu
Wingrove Maureen (Diglee)
Zidrou
Vehlmann Fabien
Lepage Emmanuel
Maester
Maury William
Mazaurette Maïa
Le Tendre Serge
Tabary Nicolas
De Crecy Nicolas
Ptiluc
Mattotti Lorenzo
Plessix Michel
Morvan Jean-David
Giroud Frank
Pellerin Patrice
Neel Julien
Runberg Sylvain
Chabouté
Tranchand Pierre (Pica)
Tronchet Didier
748 auteurs sont signataires et solidaires :Lettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 4/9
Ayroles Alain
Adam Benjamin
Afif Khaled
Ahrweiller Lucile
Alary Pierre
Albert Éric
Albin Guillaume
Albuquerque Alberto Jimenez
Alexe
Alessandra Joël
Alexandre Daniel
Algésiras
Alliel Christophe
Alloing Louis
Alluard Marie-Paule
Alvès Christophe
Alwett Audrey
Amoretti Francois
Amouriq Alexandre
Amouriq André
Amouriq Isabelle (Mirabelle)
Andreae Jean-Baptiste
Anfré Jérôme
Ansar Christophe
Appert Étienne
Araldi Christophe
Aris Gilles
Armand Dimitri
Arnoux Erik
Asciach Marie-Laure
Astier Laurent
Augustin Virginie
Auverdin Jean
Aurita Aurélia
Avril marie
Astaza C
Awaad Sophie
Babouche Cédric
Bailly Vincent
Baker Steve
Baldetti Laurence
Bannister Nicolas
Bar
Barbaud Jean
Barral Nicolas
Barte Allan
Bartoll Jean-Claude
Bast
Bastide Jean
Batem
Baudy Romain
Bauer Jean-Claude
Bauthian Isabelle
Bazot Kevin
Bec Christophe
Bec Guilhem
Bechu Denis
Béhé Joseph
Benéteau Benjamin
Bengal
Berlion Olivier
Bernard Fred
Bertail Dominique
Berth
Bertocchini Frédéric
Bessonneau Céline
Betbeder Stéphane
Beuriot Jean-Michel
Beuzelin Boris
Bezian Frédéric
Biancarelli Franck
Bileau Stephane
Bingono Brice
Blanchet Virginie
Blanchot Mathieu
Blandin Marine
Blary Benoît
Blier Fred
Bodet Delphine
Boilet Frédéric
Bollée Laurent-Frédéric
Bonbon Cécile
Boyington Meï
Boidin Marc-Antoine
Boiscommun Olivier G
Bono Fabio
Boquet Olivier
Bordier Jean-Paul
Boucharlat Marion
Bouilhac Claire
Boukhezzer Mehdi
Boulard Juliette
Bourgne Marc
Bourhis Hervé
Bouton Bertrand
Bouzard Guillaume
Brachet Nicolas
Brahy Luc
Bramanti Olivier
Brangier Stephane (Siro)
Brazao Olivier
Brémaud Frédéric
Bretzner Jérome
Briclot Alexis
Bricod Camille
Brion Alain
Brivet Antoine
Brossard Florent
Brosseau Cécile
Brosset Sylvain
Brugeas Vincent
Bruneau Clotilde Lettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 5/9
Brunnelière Lucie
Brunschwig Luc
Buquet Samuel
Burger Camille
Burckel Paul
Bussi Audrey (Odré)
Cabanes Max
Cadène Thomas
Calvez Florent
Calvo david
Camp Adélaîde
Campoy Frédéric
Camus Jean-Christophe
Cano Jean-Luc
Cardona Philippe
Carette Julien
Carin Francis
Carpentier Stéphane (Wallace)
Cartier Éric
Carrere Serge
Cauuet Paul
Cazenove Christophe
Cazot Véronique
Céka
Ceyles Cyril
Césano Angélique
Chabane Lounis
Chabbert Eric
Chagnaud Jean-Jacques
Chaland Carole
Chamblain Joris
Chanoinat Philippe
Chapelle Philipp
Chapron Glen
Charlet Gregory
Charlot Philippe
Chaize Etienne
Chauvel David
Chauzy Jean-Christophe
Chevais-Deighton Edouard
Chicault Cécile
Cholet Sophian
Chrispeels Didier (Crisse)
Clarke
Clemansaud Laure
Coicault Fred
Corbet Sebastien
Corboz Yannick
Cordurié Sandrine
Cordurié Sylvain
Corgié Johan
Coronas Christophe (Cecil)
Corre Gilles (Erroc)
Coryn Laetitia
Cossu Brice
Coudray Jean-Luc
Crenn Laurent (Loran)
Créty Stéphane
Croix Laurence
Cuvillier Damien
Cuzor Stev
Cyrielle
Dabas Nicolas (Dab’s)
Da Costa Charles
Damour
Dauvillier Loïc
Dauvin Stéphane (Stédo)
Dav
Decrock Emilie
Defali djillali
Delestret Nicolas
Delf
Dellac Benoît
Deloizon Guillaume
Dem
Demare Nicolas
De Metter Christian
Denis Isabelle
Dépinay Christophe
Dérian “Turalo” Eric
Derrien Jean-Christophe
Deslouis Capucine (Capucine)
Devos Winoc (Winoc)
Dahan Benoit
D’Aviau Jérôme Jérôme (Poipoi)
David Etien
Daviet Vera
Debard Cédric
de Bonneval Gwen
Delmas Gabriel
Derrien jean-Christophe
De Rochebrune Thibaud
Deruyck Vincent (Ancestral Z)
Desclides Coline
Dethan Isabelle
Di Martino Richard
Di Sano Bruno
Djian jean -Blaise
Docarmo Cristina
Dodier Alain
Dollégeal Stéphane
Domas Tattiana
Dorey Véronique (Ruby)
Dormal Alexis
Ducoudray Aurélien
Dufau Elric
Dufranne Michel
Duhamel Bruno
Dumas Patrick
Duprat François
Duprez Dominique (Riff Reb’s)
Dupré la Tour FlorenceLettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 6/9
Durand Elodie
Durand Michel
Duval Fred
Dutrait Vincent
Eyvie
Erbetta Luca
Ernst Serge
Etrivert Juliette
Farace Renaud
Faro
Faulques Julie
Fayolle Diane
Fayolle Marion
Felix Jérôme
Fenech Philippe
Ferlut Nathalie
Ferran Sébastien
Ferrandez Jacques
Ferrier Katherine
Fino Serge
Fior Manuele
Filliatre Guillaume (El don guillermo)
Flamand Julien
Fontaine Sylvie
François David
Fréreau Charlott
Friess Etienne
Gabella Mathieu
Gajewski Pierre (PieR)
Galandon Laurent
Gander Caroline (Caro)
Garréra Jean-Luc
Gaschet Romain (Geyser)
Gaudelette Michel
Gaudin Jean-Charles
Gauthier Severine
Gautier Anne-Charlotte
Gaultier Christophe
Girard Stephane (Gess)
Gelli Dominique
Gély Laurent (Lorenzo )
Germaine Florent
Gillot Philippe (Phicil)
Gilson François
Giner Belmonte Antoine
Gloris Thierry
Gnoni Laurent
Gobbo Ludovic
Gobi
Godard Christian
Goepfert Brice
Gom
Gomez Lucile
Gordon Tib
Goubelle Dominique
Gourdon Bénédicte
Goutal Alain
Goux Pierre-denis
Grandpey Ronal
Grange Dominique
Grattery Edith (Edith)
Grelin
Grenon Jean-Christophe (Bloz)
Grimaldi Flora
Guerineau Richar
Gihef
Guilmard Pierre
Guth Claude
Greiner Virginie
Grellard Emmanuel (Grey)
Grenier Sebastien
Grey Manu
Grisseaux Véronique
Guenet Nicolas
Guéro Gerard (Ange)
Guilloteau Boris (Bang!!)
Guilmard Pierre
Hans Stéphanie
Harel Appoline
Harambat Jean
Hautière Regis
Hemstege Anne
Henaff Patrick
Henninot Eric
Henrichon Niko
Henscher Olivier
Hérault Kevin (trantkat)
Hersent Gaelle
Herval
Hersent Gaëlle
Hinder Carine
Hubert
Hudrisier Cécile
Hyman Miles
Istin Jean-Luc
Jacamon Luc
Jalbert Philippe
James
Janssens Jean-Louis
Jaffredo Marie
Janolle Alain
Jarbinet Philippe
Jef
Jenfèvre
Jmei Abdessatar
Joan
Joblin Jean-Pierre
Jolivet Olivier
Jouannigot Loïc
Jousselin Pascal
Jouvray Olivier
Juncker NicolasLettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 7/9
Jung Etienne
Jurdic Benjamin
Juszezak Erik
Jusseaume Patrick
Kara Philip
Kerfriden Malo
Khattou Bernard (Katou, Frisco, Meroll Jr, Bénika)
Kispredilov Alexeï
Knittel Cyril
Kraehn Jean-Charles
Krassinsky Jean-Paul
Krystel
Kris
Labiano Hugues
Labourot Thomas
Labrosse Thierry
Lacaf Fabien
Lacou Benoît
Lagrange Tristan (Tristoon)
Lagrue Lauren
Lambert Julien
Lambour Severine
Lamontagne Jacques
Lamour Fred
Lamy Thierry
Lannes Christopher
Lapierre François
Laprun Amandine
Larbier Philippe
Larme Patrick
Lassagne Frédéric (Terreur Graphique)
Laumaillé Alexis
Laurent Marion
Lavaud Pierre (Mazan)
Lax Christian
Le Berre Eric
Le Berre Johann
Le Breton Ronan
Leclerc Martin (Maël)
Ledoux Dominique
Le Discot Olivier
Le Galli Michaël
Legars Joël
Legrand Benjamin
Le Grand Marc dit Joub
Lefebvre Ronan (Sti)
Lefeuvre Laurent
Le Henanff Fabrice
Lejeune Steven
Leprévost Thierry
Lejeune Yannick
Leprieur Bejani Mehdi-Jérôme (Jeromeuh)
Lerolle Christian
Leroux Etienne
Leroux Johann (Ullcer)
LeSaëc Erwan
Le Sourd Patrice
Léturgie Simon
Lhuissier Basile
Liberge Eric
Liman Ingrid
Liotti Giuseppe
Looky
Loubatieres Christophe (Lylian Klepakowsky)
Louis Stephane
Loyer Jean-Luc
Luccisano Silvio
Lupano Wilfrid
Lupano Rodolphe (Ohazar)
Maffre Jérome
Maffre Julien
Mainguy Dominique
Maïonara Bruno
Malaussena Philippe
Malinas “Domas” Dominique
Malka Richard
Malfin Nicolas
Mallet Patrick
Mallié Vincent
Mangin Valérie
Manini Jack
Marazano Richard
Marcé Gwenaël (Weissengel)
Marceau Bertrand (Monsieur B.)
Marcel Paul
Marcelé Philippe
Margueritte Sauvage
Marin Olivier
Mariolle Mathieu
Marniquet Frédéric
Martin Jaime
Martin Jean-François
Martin Olivier
Martinez Christian (Gine)
Marty Lionel
Masbou Jean-Luc
Mathieu Esteban
Mathieu Marc-Antoine
Mattiussi Laureline
Matz
Maucler Christian
Meckler Florian
Mélanÿn
Mélchior-Durand Stéphane
Ménage Mathieu (Emem)
Ménetrier Samuel
Merlet Isabelle
Mermin Alexandre (Poupard)
Meunier Henri
Meurisse Catherine
Merwan
Merezette Denis (Chetville)Lettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 8/9
Michalak Emmanuel
Michaud Raphaëlle
Mig
Millotte Didier
Minguez Jean-Marie
Miniac Jean-François
Miroir Boris (la tête X de chez ottoprod et BenGrrr)
Miss Holly
Moloch
Monin Arno
Montaigne Marion
Montaigne Thimothée
Montellier Chantal
Mony-chan Pierre
Morse Rebecca
Mosdi Thomas
Mounier Alain
Mourier Jean-Louis
Moynot Emmanuel
Muller Catel (Catel)
Munuera Jose Luis
Mupa Pascale
Neaud Fabrice
Nemiri Nicolas
Neyret Aurélie
Nhieu Manu
Nicoby
Nicoli Dominique (dodo)
Nikolavitch Alex
Nivet Mathilde
Nouhaud David
Nouveau Thierry
Noël Claire
Oger Tiburce
Oiry Stéphane
Ookah
Ormière Olivier
Osuch Dominique (Domnok)
Otero Nicolas
Ott Anne-Catherine
Ozanam Antoine
Paganotto Camille
Paicheler Pénélope
Palomino Clotilde
Parra Julien
Parlange Adrien
Parnotte Joël
Pastor Anthony
Pavot Jacques
Pecout Christelle
Pecqueur Daniel
Peeters Benoît
Pellet Philippe
Peyraud Jean-Philippe
Perreard Horne
Perriot Vincent
Péroz Maxime
Peru Olivier
Preteseille Benoît
Peynet Frédéric
Peynet Catherine (Thorn)
Picard Alice
Pilet
Pinel Ariane
Pinet Nicolas
Pinson Ugo
Pirus Michel
Phicil Philippe
Place Pierre
Plateau Émilie
PlatekDorothée
Plumail Claude
Pona Nicolas
Pontarolo Fred
Pollet Aurélie
Pontet Cyril
Portet Seb (Espé)
Pothier Nicolas
Popcube
Poupon Nicolas
Pourquié Jeff
Prugne Patrick
Puchol Jeanne
Quaresma Antoine
Quéré Arnaud
Queyssi Laurent
Radomski Yohan
Regnault Christophe
Renier Marc
Reynès Mathieu
Ricard Anouk
Ricard Sylvain
Richelle Philippe
Richez Hervé
Rieu Delphine
Rivaud Sylvain
Roane Alexandre
Robin Thierry
Robin Alexis
Robin Christelle (Krystel)
Robin Nicolas
Roche Sébastien (Kieran)
Rodier Denis
Rodolphe
Rodrigue Michel
Rogeret Augustin (Augustin)
Rollin Lucien
Roque Caroline / Escaich Bertrand (Beka)
Rossbach Jean-Sébastien
Rosset Aurelien
Rouchier Vincent (Vince)
Roudier EmmanuelLettre ouverte des auteurs de Bande Dessinée à Madame la Ministre de la Culture page 9/9
Rouger Jean-Jacques
Roulot Christian
Rousseau Murielle
Roussel François
Rouviere Julie
Rouvin Anne
roux Mickaël
Ruckstuhl Eric
Rypert Fabien
Ryser
Sabater Sylvie
Sala Jean-Luc
Sala David
Salamagnou Philippe (Saimbert)
Salsedo Frédérik
Sandro
Sato
Savoia Sylvain
Sarn Amélie
Schmit Alexandre (Chandre)
Schwartz Olivier
Scoffoni Philippe
Sénégas Christophe
Sentennac Alexis
Seure Le Bihan Ronan
Serrou Benoît (Pixel Vengeur)
Schiavinato Eric
Seiter Roger
Servain
Sieurac Laurent
Simon Anne
Simon Fred
Simonetti Marc
Siner Nicolas
Sintes Anne-Soline
Slocombe Romain
Sobral Patrick
Solé Jean
Solé Julien
Soleilhac Aude
Sorel Guillaume
Soulicié Thibaut
Springer Benoit
Stalner Eric
Stan Silas
Sterin Nicolas
Sternis Philippe
Stibane
Supiot Olivier
Surcouf Erwan
Suro Michel
Swal Christophe
Taduc Olivier
Tanquerelle Hervé
Tallec Olivier
Taranzano Pierre
Tardif Nathanaël
Tarek
Tarquin
Tarral Philippe
Tatti Bruno
Tefenkgi, Alex
Terlecki ivan (Libon)
Terrasson Delphine
Terrasson Thierry (Jim, Tehy)
Thomas Nadine
Thomas Olivier
Tieko
Tillier Beatrice
Tota Ciro
Toulhoat Ronan
Tran Anne-Laure (Anlor)
Tripp Jean-Louis
Turrel Sophie
Turlan Luc
Tuveri Igor (Igort)
Vaccaro Eddy
Valambois Rodéric (Rod)
Valeani Yann
Valente Tony
Vandaele Philippe
Van der Zuiden Emilio
Vang Paku
Van Liemmt Simon
Van Linthout Georges
Vanyda
Vastra Sebastien
Varanda Alberto
Vatine Olivier
Verhille Sophie
Vernay Valérie
Verron Laurent
Vervisch Fred
Veys Pierre
Vidal Virginie
Vignaux Fred
Vink
Wachs Pierre
Weinstoerffer Anne (Teuf Anne)
Wendling Claire
Wens Isaac
Winisdoerffer Francis (Winis)
Woehrel Jean-Marie
Yigaël
Yllya
Zanzim
Zielinska Zuzanna
Zonk Zelda
Zouzoulkovsky Vincent
Zuber Eleonore

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Les auteurs de BD prêts au hara-kiri

Merci à Jean-Christophe Ogier d’avoir parlé dans sa chronique de France Info de l’explosion des cotisations retraite qu’on veut imposer aux auteurs.

Les auteurs de BD prêts au hara-kiri

C’est le paradoxe du moment. D’un côté, les réseaux sociaux relaient la colère des auteurs de bande dessinée à qui leur caisse de retraite vient d’imposer sans concertation une cotisation minimale de 8% de leurs revenus bruts.

L’intention est louable. Il s’agit d’assurer un minimum décent aux vieux auteurs qui auront les yeux usés et la main qui tremble. Sauf que, comme l’explique fort bien le documentaire “Sous les bulles” de Maïana Bidegain , reportage de 52 minutes également relayé ces derniers jours de Twitter en Facebook, la précarité de la plupart des auteurs qui tentent de vivre de leur art est telle que ces 8% de prélèvement vont, selon toute probabilité, en envoyer quelques uns au chômage.

Deux d’entre eux ont devancé l’appel : Bruno Maïorana , dessinateur à succès de la série Garulfo chez Delcourt, fait le constat amer que le 9ème art n’est pas viable. Il arrête le métier. Idem pour le scénariste Philippe Bonifay . Il parait désormais près de 5.000 nouveautés chaque année. Et la plupart des auteurs gagnent moins de 1.000€ par mois.

Paradoxe, donc, car de l’autre côté, les planches originales s’arrachent dans les salles des vente. A l’image de la page de garde historique de Tintin achetée 2,65 millions d’euros le week-end dernier chez Artcurial. Et on remet ça, chez Millon, le 15 juin, en duplex Paris-Bruxelles avec du Franquin, Tillieux, Macherot, Hergé, Uderzo ou Peyo. Soit, l’âge d’or de la BD.

Jean-Christophe Ogier

Auteurs : explosion des cotisations retraite !

De manière unilatérale le RAAP, le régime de retraite des auteurs, a décidé qu’à partir de 2016, la cotisation passerait d’un montant librement choisi à une ponction obligatoire de 8% des nos droits d’auteurs. Dis autrement, ça fait UN MOIS COMPLET de nos revenus !

Sous les Bulles

Je vous avais parlé de l’excellent documentaire Sous les Bulles, L’autre visage de la BD l’année dernière. Vous pouvez maintenant le regarder gratuitement en ligne. Une excellente initiation à la complexité et aux difficultés du métier d’auteur de BD.

Les auteurs, bientôt tous à poil ?

Important message du CPE, le Conseil Permanent des Écrivains, qui rassemble l’ensemble des organisations d’auteurs.

Les auteurs, bientôt tous à poil ?

Les associations et sociétés d’auteurs du Conseil Permanent des Écrivains s’inquiètent de l’accumulation de décisions, rapports et réformes qui viennent depuis quelque temps fragiliser les principes du droit d’auteur et la situation sociale, fiscale et économique des auteurs.

Or, sans auteurs justement rémunérés et légitimement défendus, il ne peut pas exister de création éditoriale de qualité, libre et diversifiée.

Le CPE souhaite aujourd’hui alerter le Gouvernement et les parlementaires, l’ensemble des acteurs et partenaires de la chaîne du livre, les journalistes et plus largement l’opinion publique, sur les risques suivants :

  • Une incertitude grandissante sur les revenus des auteurs tant pour l’imprimé (taux de rémunération inférieur à 10% pour 60% des auteurs, diminution du montant moyen des à-valoir…) que pour le numérique (diminution de l’assiette de rémunération sans minimum garanti, dissolution des revenus dans le cadre de ventes par bouquets, d’abonnements ou de recettes indirectes…).
  • Une réforme du régime social des auteurs qui soulève de nombreuses interrogations.
  • Une augmentation considérable des cotisations pour la majorité des auteurs, qui génère des inquiétudes quant à l’ouverture de droits (cotisation vieillesse, cotisation retraite complémentaire, cotisation formation continue…).
  • Une hausse injustifiée de la TVA sur les revenus de droits d’auteur (de 5,5% à 10% en moins de deux ans), alors que la TVA sur le livre a baissé et sans qu’il y ait eu de revalorisation de la part TVA des droits d’auteur couvrant les frais professionnels.
  • Une fin de non-recevoir pour le retour à une franchise fiscale censée couvrir l’ensemble des frais professionnels, comme c’est le cas pour de nombreuses professions artistiques.
  • Une possible remise en cause du droit d’auteur au niveau européen.
  • Un climat inquiétant pour la liberté de création dans certains secteurs.

Le CPE souhaite que toutes ces questions soient entendues et fera ses propositions lors de la conférence de presse du 18 mars 2014.

ADAGP, ATLF, Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse, Cose Calcre, EAT, Maison de Poésie, Pen Club de France, SACD, SAIF, SCAM, SELF, SGDL, SNAC, Union des poètes & Cie, UNPI, UPP.

CONFÉRENCE DE PRESSE
Alerte sur la condition de l’auteur
Mardi 18 mars 2014 à 9h30 à l’Hôtel de Massa
38 rue du Faubourg Saint-Jacques 75014 Paris

CONTACTS
Cristina Campodonico : communication@sgdl.org – tél : 01 53 10 12 15
Stéphane Joseph : stephane.joseph@scam.fr – tél : 06 82 90 01 93

Tout sauf un métier ?

Un cousin m’a écrit pour avoir des conseils pour son fils, qui, à 13 ans, participe avec talent à un atelier BD hebdomadaire, et qui se pose la question d’une éventuelle orientation vers le métier de dessinateur de Bande Dessinée. Je lui ai répondu, très honnêtement, ce que je pensais de l’avenir de notre profession. En relisant cette réponse, ma franchise m’a fait froid dans le dos. Et je me suis demandé si j’avais le droit de garder ma vision de l’avenir pour le cercle familial… Je copie-colle donc cette réponse ici :

Je vais pour commencer, te faire un petit résumé de l’état de la BD, vu qu’on parle d’un avenir professionnel à plus de dix ans pour ton fils.

La BD sort de ses trente glorieuses. La croissance depuis les années 60 a été prodigieuse. C’est un des secteurs les plus toniques et les plus important de l’édition. Cette croissance a été accompagnée depuis les années 80 et 90 par une montée institutionnelle (musées, festivals etc), éducative (écoles supérieures publiques et privées) et médiatique. Bref, tout semble aller pour le mieux.

Mais depuis presque 10 ans, la croissance économique de la BD stagne alors que le nombre d’auteurs ne cesse d’augmenter. Ne serait-ce que parce que les écoles créées dans les années 90 délivrent leurs contingents de postulants tous les ans sur le marché. Comme les coûts d’impressions n’ont fait que baisser, le nombre d’albums a aussi explosé. Pour te donner une idée, il sortait 600 albums en 1995 quand j’ai commencé, alors qu’on est a près de 5000 par an aujourd’hui. Or les auteurs ne sont pas salariés, mais vivent de droits d’auteur, qui sont de 4 (s’ils sont deux) à12% du prix de vente. Un gâteau qui stagne partagé entre de plus en plus de convives, c’est des parts de plus en plus petites pour chacun. Tu l’auras compris : les revenus des auteurs sont en train de s’effondrer.

Seuls certains, dont Valérie et moi avons la chance de faire partie, touchent le gros lot. Un gros lot amplifié par le fait que, au milieu de cette pléthore de sorties, les gens se réfugient sur les valeurs sûres. Bref, les rares auteurs riches sont de plus en plus riches, et la très grande majorité de plus en plus pauvres. Autour de nous, nous assistons à une terrible paupérisation des scénaristes et dessinateurs, y compris chez des professionnels reconnus. De plus, vue l’augmentation du nombre de titres, et donc la saturation des tables de nouveautés chez les libraires, les chances d’être vu, et donc de pouvoir toucher le jack-pot pour un jeune auteur commencent à ressembler à celle d’un écrivain ou d’un musicien (proche de 0%). Et on n’a pas abordé les risques inhérents au passage de l’édition au numérique, qui va encore faire exploser l’offre, et donc baisser la vente moyenne au titre…

Bref, la BD est donc devenue, à mon avis, tout sauf un métier. C’est une passion, oui, qui continuera à rapporter aux éditeurs, oui. Mais espérer pour un auteur en tirer ne serait-ce qu’un RSA va devenir sacrément hypothétique dans l’avenir…

Je douche tes ardeurs, j’imagine. Mais je vais, de ce pas, relativiser ce triste tableau. Car ce serait ignorer que ton fils à un talent de dessinateur. Et qu’il n’y a pas que la BD qui a besoin de dessinateurs et de leur créativité visuelle. Il y a l’illustration, surtout en jeunesse (mais ira-t-elle mieux dans 10 ans que la BD ?). Il y a les décors et costumes de théâtre, de cinéma et des séries TV qui demandent du créateur visuel. Mais surtout il y a le jeu video, qui est l’industrie culturelle montante, déjà plus grosse que toutes les autres, et dont les besoins en création visuelle semblent illimités.

Je pense donc qu’il faut orienter ton fils vers une formation en art la plus large possible. Car le métier de dessinateur et de créateur est un métier de culture. Avoir des idées visuelles, c’est avant tout avoir une grande culture visuelle, la plus variée possible. Pour prendre mon exemple, j’ai appris à dessiner quasiment tout seul. Si je suis aussi installé dans mon métier d’auteur, c’est surtout grâce à la culture que m’a apporté un milieu familial favorisé suivi d’études de premier plan dans ce domaine (Beau-Arts et Arts déco de Paris). Mon dessin s’est nourri d’une capacité créative et esthétique qui manque souvent à pas mal de mes confrères, restés bloqués sur l’exercice technique du dessin.

Voilà, j’espère que ces informations et ces grands principes te permettront de réfléchir à l’orientation générale de ton fils.

Ateliers-rencontres à Blois

Pas mal de collègues auteurs m’ont demandé plusieurs fois si je ne pourrais pas leur réserver une de mes démos et/ou conférences habituelles en festival, afin qu’on puisse parler réellement boulot et que je puisse leur montrer dans le détail mes techniques de travail en informatique. Grâce au merveilleux festival BD Boum de Blois, ce vœux va enfin devenir une réalité ce samedi 23 novembre 2013.

De 10 h à 12h, une première séance sera réservée aux seuls auteurs professionnels. Nous aurons une salle à nous à la bibliothèque, juste à côté des lieux de dédicace. Venez nombreux, car si ce genre de master class entre nous marche, on pourra lancer ça dans d’autres festivals. Moi, il y a plusieurs confrères à qui j’irais bien piquer quelques infos 🙂

De 15 h à 17h30, un second atelier-rencontre sera pour les aux jeunes auteurs, futurs professionnels et amateurs avertis. Je répondrai à vos questions, je vous montrerai sur mon ordinateur comment je travaille. Et si vous êtes gentils, je vous livrerai des secrets qui ne se transmettent habituellement que de bouche à oreille d’auteurs de BD.

Les deux ateliers se passeront à la bibliothèque Abbé Grégoire, dans la limite des places disponibles, bien sûr.

ReLIRE : recours auprès du Conseil d’État

Le Droit du Serf a déposé un recours pour Excès de Pouvoir contre le décret publié au JO le 1er mars 2013 portant application de la loi du 1er mars 2012 sur la numérisation des œuvres indisponibles du XXe siècle.

Le 2 mai, notre avocat a déposé au Conseil d’État un Recours pour Excès de Pouvoir contre le décret publié au JO le 1er mars 2013 portant application de la loi du 1er mars 2012 sur la numérisation des œuvres indisponibles du XXe siècle.

Les capacités juridiques du Droit du Serf étant limitées par sa situation d’association de fait, la requête a été effectuée au nom de deux d’entre nous (Sara Doke et Ayerdhal), dont l’appartenance au collectif est dûment mentionnée.

Cette requête porte sur les multiples violations de la loi que compte le décret, contraire à la Convention de Berne, au Traité de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), au droit de l’Union européenne, ainsi qu’à la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il n’est en outre pas conforme à la loi du 1er mars 2012 (sic).

– En prenant pour objet l’exploitation numérique des livres indisponibles, le décret comme la loi font fi du principe essentiel de la protection du droit d’auteur énoncé par la Convention de Berne (articles 2.1, 2.5) qui, se référant à la seule création immatérielle (intellectuelle), induit que la propriété corporelle est indépendante de la propriété incorporelle. En d’autres termes : on ne numérise (et on n’exploite) pas un objet-livre, mais une œuvre de l’esprit.

– En fixant des procédures pour que les titulaires de droits d’auteur puissent s’opposer à l’inscription de leurs livres dans la base de données des indisponibles et à la gestion collective de leurs droits d’exploitation numérique, le décret organise une formalité prohibée par la Convention de Berne (art. 5.2) et le Traité de l’OMPI (déclaration commune sur l’article 12).

– En ne prévoyant pas qu’une autre personne que l’auteur puisse faire jouer son droit moral, le décret exclut les héritiers du mécanisme mis en place, en complète contradiction avec la Convention de Berne (art. 6 bis et 7 § 1) et la tradition juridique française qui font du droit moral un droit perpétuel (art. L 121-1 du CPI).

– En contraignant l’auteur à apporter la preuve qu’il est seul titulaire de ses droits, le décret et la loi contreviennent au principe de présomption de titularité de l’auteur sur son œuvre, violant ainsi la Convention de Berne (art. 15.1) et la directive 2004/48/CE (art. 5) du Parlement européen. Violation d’autant plus grave qu’elle impose à l’auteur une « preuve diabolique » puisqu’il lui revient de prouver un fait négatif : l’absence de cession des droits numériques.

– Le décret, comme la loi qu’il applique, est non-conforme au « test en trois étapes » (http://www.admin.ch/ch/f/rs/0_231_151/a10.html) prévu par la Convention de Berne, l’accord sur les ADPIC, le traité de l’OMPI sur le droit d’auteur et la directive européenne 2001/29. En effet, le dispositif porte atteinte à l’« exploitation normale » de l’œuvre et n’a pour effet que de faciliter l’acquisition des droits numériques par l’éditeur sans obtenir le consentement de l’auteur ; or, si le livre est qualifié d’indisponible, c’est que la résiliation de plein droit pour défaut d’exploitation pourrait opérer. En outre, puisque seule la défaillance de l’éditeur provoque l’indisponibilité d’une œuvre, l’auteur ne devrait pas avoir à partager le fruit de l’exploitation numérique de celle-ci avec lui. Cela cause un « préjudice injustifié » à ses « intérêts légitimes ».

– Le décret et la loi qu’il applique créent une nouvelle exception au droit d’auteur : cela contrevient à la directive 2001/29 (considérant 32) contenant une liste exhaustive des exceptions et limitations au droit de reproduction et au droit de communication au public et à son objectif d’harmonisation visant à assurer le bon fonctionnement du marché intérieur.

– Puisque la société de gestion agréée est investie d’une mission d’instruction, impliquant une interprétation du droit et des faits qui lui sont soumis, et dispose d’une faculté de rejet de l’opposition de l’auteur, donc du pouvoir d’instruire les demandes d’oppositions, il résulte qu’elle constitue un tribunal au sens de la Convention européenne des droits de l’homme et qu’elle doit respecter l’exigence d’impartialité. Or, c’est une véritable partialité, assimilable au conflit d’intérêt, qu’instituent la loi et le décret. Partialité subjective de par la composition paritaire de la société de gestion, au sein de laquelle l’éditeur d’origine du livre est à la fois représenté et représentant, et de par l’intérêt propre de la société de gestion. Partialité objective de par la constitution d’un comité scientifique, en majorité paritaire entre auteurs et éditeurs, qui établit la liste des indisponibles figurant dans la base de données de la BnF, au sein duquel peuvent figurer des personnes appelées à juger de l’opposition au registre, voire, comme cela a déjà été le cas (cf. François Gèze, PDG des éditions de la Découverte), de favoriser leur production dans l’établissement de la liste. L’article 6 § 1 de la Convention EDH n’est pas respecté.

– Le décret d’application n’est pas conforme au texte législatif, puisqu’il dispose que la liste des livres indisponibles est arrêtée par un comité scientifique quand la loi disposait que toute personne peut demander à la BnF l’inscription d’un livre dans la base de données. On voit bien ici que, loin de favoriser l’accès du public à des livres indisponibles, il s’agit en réalité de permettre aux éditeurs de bénéficier de l’exploitation numérique au mépris des droits d’auteur.

Maintenant que la requête est déposée, le Conseil d’État va la communiquer au gouvernement et lui impartir un délai d’un ou deux mois pour répondre à nos arguments. Il sera alors possible de présenter des observations complémentaires et de déposer une QPC. Il sera aussi possible, dans les jours qui viennent et pour qui le souhaite, de se joindre à la requête pour lui donner du poids. Plus on est de serfs, moins nous sommes taillables et corvéables à merci.

Nos arguments sont solides. Le travail réalisé par Me Stéphanie Delfour et Franck Macrez est irréprochable. Néanmoins le combat sera rude, s’étalera sur des mois et il est impossible de préjuger du résultat.
Ce qui est certain, comme nous le répétons depuis plus d’un an sans être entendus ni pris au sérieux, c’est que nous ne lâcherons pas.

Nous tenons à remercier vivement tous ceux – chacun se reconnaîtra – qui ont donné de leur temps, de leurs compétences ou de leur porte-monnaie pour la mise en œuvre de cette action, ainsi que tous ceux qui n’ont pu nous soutenir que moralement, faute d’être les millionnaires libres de toute contrainte que certains médias laissent accroire.

NB : Lors du dépôt du REP, quelques heures avant la deadline, aucun autre recours n’avait été formé. S’il est évident que la SGDL, mouillée jusqu’au cou dans l’élaboration de cette loi et dans la promotion d’icelle et de ses conséquences, n’allait pas se tirer une balle dans le pied, c’est pour le moins surprenant de la part d’autres associations, notamment d’auteurs, qui ont pourtant, parfois, exprimé des critiques acerbes contre les aberrations de l’usine à gaz que le décret instaure. Nous espérons néanmoins que certaines d’entre elles choisiront de nous appuyer ou de nous rejoindre dans notre requête.