Ce matin, je vois passer sur Facebook « une image de la NASA montrant le lancement de la navette Atlantis en 2006 prise par un avion de très haute altitude, le WB-57 ». Peu d’internautes l’auraient sans doute questionnée il y a encore un an, mais là, tout de suite, beaucoup parlent de trucage ou d’IA.
En fait, c’est bien la photo du lancement, mais recadrée, avec de l’ajout de flou sur le fond, ce qui lui donne cette apparence de maquette photographiée au macro-objectif. C’est donc une vrai-fausse image réelle, une version esthétisée d’une photographie.
Avec l’apparition des images générées par IA, pas mal de gens sont en train de devenir plus prudents avec ce qu’on leur montre. Et cela va devenir le cas dans tous les domaines touchés par les IA de génération de contenus. On peut s’en réjouir, mais on peu aussi s’en inquiéter. Ce monde numérique des fake news, des arnaques e-mail, des virus et des contenus IA ne serait-il pas en train de nous rendre tous complètement paranoïaques ?
La Fédération internationale pour les droits humains réunit 188 organisations de défense des droits de l’Homme. Aujourd’hui, elle se retrouve à devoir apporter son soutien à un de ses membres fondateurs, la Ligue des droits de l’Homme française.
Pourquoi ? Parce que l’actuel ministre de l’Intérieur menace la LDH de graves représailles économiques pour avoir osé documenter tout ce qui ne va pas dans le maintien de l’ordre en France.
S’en prendre aux organisations de défense des droits humains comme aux syndicats n’est pas un geste mineur. Ce gouvernement passe son temps à dénoncer les extrêmes, mais semble être capable de dériver tout seul vers le pire.
En 2006, j’ai arrêté de faire des dédicaces dessinées, pour plein de raisons que j’avais expliquées à l’époque. En 2015, j’avais tout de même accepté de refaire cinq belles dédicaces payantes pour aider à financer un nouveau festival dont j’étais le parrain.
Huit ans plus tard, je remets le couvert pour soutenir l’ami Jean-Marie et sa librairie La Cour des Miracles à Caen. Je réaliserai cinq dédicaces en couleur (encres ocre jaune et ocre rouge + trait noir) dans l’album Universal War 1 ou 2 de votre choix.
Chaque dédicace sera vendue à 500 euros. C’est, bien sûr, hors de prix, mais c’est pour une bonne cause. Je précise que je ne toucherai pas un centime sur cette opération « caritative ». Et à ce prix, vous pourrez choisir évidemment ce que je vous dessinerai (dans les limites du raisonnable et du bon goût, évidemment).
Je réaliserai ces cinq dessins à la librairie pendant l’après-midi du 15 avril. Cela permettra à ceux qui n’auront pas les moyens de s’offrir un tel cadeau d’au moins profiter de cette session de dessin. Ce sera surtout l’occasion de venir discuter. Et comme ce sera ce jour-là les 25 ans de la librairie, il y a tout un programme festif de prévu !
Pour vous inscrire, contactez Jean-Marie Le Callonec, le libraire. La priorité sera donnée à ceux qui pourront être présents sur place, puis aux premiers inscrits.
Voilà, je compte sur vous pour participer à ce grand plan de sauvegarde de La Cour des Miracles !
⚠️ MISE À JOUR : LES DÉDICACES SONT DÉJÀ TOUTES RÉSERVÉES
Je suis assez ému d’apprendre le décès du contreténor James Bowman. C’est avec lui que j’ai été initié à tout un pan de la musique baroque. Je me rappelle encore très bien du choc émotionnel pendant mon enfance quand j’ai entendu pour la première fois le Stabat Mater de Vivaldi qu’il avait enregistré en 1976 avec the Academy of Ancient Music sous la direction de Christopher Hogwood.
Étonnement, je viens tout juste de racheter ce disque en CD tant j’avais usé mon disque vinyl d’époque, au point de le faire sonner un peu trop feu de bois. Lundi, j’ai donc déballé cet enregistrement pour le tester sur le tout nouvel amplificateur Hifi qui vient d’arriver à la maison. L’occasion de comparer la magie d’un CD sur une amplification Full Digital avec un vieux 33T usé sur un ampli à lampes.
Réécouter ce Stabat Mater a été un moment merveilleux qui a résonné à fond dans toute la maison. Et la voix de James Bowman m’a fait fondre encore une fois.
Depuis la fondation de la Ligue des auteurs professionnels nous réclamons une démocratie sociale digne de ce nom pour les artistes-auteurs. Et on en est loin.
En effet, fin février, le ministère de la Culture organisait une réunion pour préparer le prochain cycle de négociation entre auteurs et éditeurs. Au moins deux organisations syndicales qui souhaitent pourtant participer aux négociations n’étaient pas conviées : côté auteurs le CAAP, Comité Pluridisciplinaire des Artistes-Auteurs·trices, et côté éditeurs la FEDEI, Fédération des éditions indépendantes.
Le CAAP est pourtant en pointe depuis des années dans la défense des artistes-auteurs, et a en parallèle été nommé, faute d’élection, par ce même ministère au conseil d’administration de la Sécurité Sociale des Artistes-Auteurs.
Le CAAP ne s’est pas démonté, et s’est présenté à la réunion avec un commissaire de justice (un huissier) pour faire constater l’entrave aux libertés syndicales. Malgré cela, on lui en a interdit l’entrée. Va-t-il falloir à nouveau retourner devant la justice ? Rappelons que le CAAP et la Ligue ont déjà dû assigner le ministère de la Culture devant le Conseil d’État pour que le droit français transcrive correctement la « rémunération appropriée et proportionnelle » obligatoire au niveau européen1.
Bref, voici ce qui se passe lorsqu’il n’y a pas de d’élections professionnelles : ce ne sont pas les artistes-auteurs eux-mêmes, mais les pouvoirs publics qui décident qui a le droit ou pas de représenter… les artistes-auteurs. Est-ce cela la démocratie sociale ?
Cher ministère de la Culture, doit-on encore une fois vous citer le rapport Bruno Racine2 ?
En proposant un calendrier de mise en œuvre de ses recommandations, la mission souligne que certaines de ces mesures conditionnent les autres. Il s’agit en effet :
– de renforcer les artistes-auteurs collectivement, par l’organisation rapide d’élections professionnelles qui permettront de donner corps et légitimité au Conseil national des artistes-auteurs à créer afin de servir de cadre à la négociation collective avec les diffuseurs.
J’apprends à l’instant le décès de Thierry Cailleteau. Quel choc. Et que de souvenirs.
1994. Thierry, fan d’ordinateur, voulait faire un CD-ROM sur Aquablue, la série vedette qu’il scénarisait à l’époque. Il passe donc avec Guy Delcourt à l’atelier de Mathieu Lauffray un des jours où je suis là. Mathieu, jeune auteur de la maison d’édition, leur avait dit que j’étais de bons conseils sur les questions de développement informatique.
Sur ma table, il y a, bien visibles, les planches de L’Arche, un projet de science-fiction que je rêve de signer chez un éditeur. Guy n’en a cure, mais Thierry les regarde quelques minutes. Puis on va déjeuner au restaurant à côté, où l’on discute donc de faisabilité d’un CD Rom. Après le repas, Thierry demande à repasser à l’atelier. Il se plante à nouveau devant ma table et les planches de mon projet SF. Puis me demande, avec le grand sourire qui était le sien, si je ne voudrais pas dessiner un album pour lui. Et j’ai vite compris ce qu’il avait en tête : me faire reprendre Aquablue.
Quelques planches d’essai plus tard, Guy et Thierry m’annonçaient que ce projet ne se ferait pas pour des raisons indépendantes de leur volonté. Mais Thierry ne m’oublia pas, et m’envoya bien vite un autre scénario, Cryozone, une histoire de zombies dans un vaisseau spatial en même temps réaliste et fun. Ce fut donc ma première collaboration au long cours. Je ne compte plus les grandes discussions de passionnés de science-fiction ni le nombre de fax échangés entre nous pour faire le meilleur album possible. Mais ce furent aussi les bonnes rigolades, les heures passées chez lui à jouer à Doom en réseau et les descentes dans les bars de Rouen avec ses nombreux potes.
Nous avons fait les deux albums prévus ensemble. Et grâce à la notoriété de Thierry, j’ai connu le succès avec ces premiers livres. Mais je l’avais prévenu dès le départ que j‘étais un raconteur en images plus qu’un dessinateur. J’ai donc repris ma liberté, et j’ai même dû changer de maison d’édition pour pouvoir écrire seul mes histoires, comme je le faisais depuis mon enfance. Mais c’est une autre aventure.
En écrivant ces lignes, je repense à la dernière fois où nous nous étions revus à Rouen, pour une expo rétrospective sur ma carrière. Je n’ai jamais oublié que celle-ci lui doit beaucoup. J’ai connu la meilleure des entrées dans ce métier grâce à Thierry. Il a su voir dans mes planches de l’époque ce qu’aucun éditeur n’avait perçu avant. Il m’a ensuite livré un excellent scénario, plein d’idées et de scènes passionnantes à dessiner. Il m’a surtout montré qu’une bonne histoire, même à grand spectacle, passait par les personnages. Car Thierry, entre autres par son art du dialogue, avait su mettre dans ceux de Cryozone toute son incroyable truculence. J’imagine qu’avec son départ, la ville de Rouen va sembler soudainement très calme…
Merci Thierry. Et mes condoléances à tous les tiens.
Depuis octobre 2022, le Collège de France consacre à la Bande Dessinée un cycle de cours, de séminaires et de colloques sous la direction de Benoît Peeters. Pour ceux qui l’ignoreraient, le Collège de France, c’est le graal de la reconnaissance intellectuelle et universitaire.
En octobre 2020, dans le cadre de l’Année de la BD, la vénérable institution avait demandé à Benoît Peeters d’organiser une journée sur le 9e Art. Benoît est évidemment un des scénaristes, historiens et théoriciens les plus respectés de la BD, mais a aussi animé à nos côtés les États généraux de la Bande Dessinée qui ont provoqué, entre autres, le rapport Lungheretti et cette Année de la BD 2020.
Deux ans plus tard, le Collège de France a décidé d’aller plus loin et de confier à Benoît la chaire Création artistique. Cours, séminaires, colloques, c’est un très riche ensemble qui nous est proposé durant toute cette année académique 2022-2023.
J’avoue que Valérie et moi regrettons bien de ne plus habiter Paris pour aller écouter de vive voix notre ami Benoît. Heureusement, l’ensemble des cours du Collège de France sont en ligne, en vidéo et en podcast. Je vous ai mis les principaux liens déjà disponibles ci dessous.
Ce cycle se conclura le 7 juin par le colloque Nouveaux chemins de la bande dessinée. J’ai l’honneur d’être dans les intervenants conviés par Benoît Peeters. Si l’on m’avait dit un jour que j’irais dire quelques mots sur la scène du Collège de France… Merci Benoît !
Leiji Matsumoto, le créateur, entre autres, d’Albator, est décédé à l’âge de 85 ans. Avec Valérie et l’ami Berberian, nous avions eu le plaisir de passer une soirée avec lui lors du festival d’Angoulême 2013. Ce fut un moment assez étonnant, nous avions échangé (via interprète) sur beaucoup de sujets. Je dois dire que je garde un souvenir assez marquant de son regard intense et de sa gestuelle calme et incisive.
À la fin, nous avions dédicacé sur le livre d’or de la ville. Impressionnant de dessiner sous l’œil très attentif de Leiji Matsumoto ! Alors que je stressais déjà d’ajouter ma modeste contribution à toutes celles de mes illustres prédécesseurs !
On n’a pas pris de photos. Mais il reste de cette épisode un dessin de Charles Berberian paru dans “Mon Lapin” numéro 1 quelques mois plus tard. Surtout il nous reste le souvenir d’une sacrée rencontre. Merci Leiji Matsumoto !
On aurait pu croire que la réforme des retraites allait, au moins, profiter aux plus petites pensions. Mais il devient très clair que bien peu sont concernées par la fameuse hausse à 1200 euros annoncée par le gouvernement. En gros, si vous avez une carrière incomplète, si vous avez travaillé à temps partiel ou si vous avez été sans emploi un temps, vous ne ferez pas parti des « veinards ». Quand c’est BFMTV qui l’écrit, et non l’Humanité, on commence à savoir à quel point cette réforme coûtera beaucoup à tous sans vraiment profiter aux plus faibles.
Qu’en est-il pour les auteurs et autrices ? Avec l’absence de tout contrat de travail comme de l’assurance chômage, leurs carrières sont souvent en dents de scie. Dans le milieu de la Bande Dessinée, elles ont en plus du mal à démarrer réellement avant 25 ans… Avec des cotisations en vrac, on peut donc imaginer ce qui attend les auteurs à la retraite.
On pourrait se dire qu’heureusement, dans la création artistique, on ne prend jamais réellement sa retraite, et qu’on peut cumuler des revenus de la création avec sa mauvaise pension. Ce serait penser que la plupart des artistes-auteurs sont encore au travail à 64 ans. Hélas, si on continue à créer en général jusqu’à sa mort, il est très dur de rester toute sa vie professionnel au sens d’en tirer des revenus suffisants. Suffisant ne serait-ce que pour acquérir par ce biais des trimestres de retraite.
Pour la BD, l’étude des États généraux de la Bande Dessinée de 2016 a montré cette entrée tardive dans le métier mais aussi une éviction précoce à partir de 50 ans. Dans les faits, je vois bien que la plupart de mes jeunes collègues des années 90 ont dû changer de métier depuis. Le succès est déjà rare dans nos pratiques, mais conserver un succès plusieurs décennies confine au véritable miracle. La plupart des auteurs gagnant moins que le SMIC mensuel ils finissent, à un moment, par craquer et se réfugient, s’ils le peuvent, dans un métier moins précaire. Ceux qui restent n’ont plus qu’à prier pour ne pas être ringardisés et remplacés par de jeunes entrants toujours plus nombreux et souvent moins chers…
On le voit, être artiste-auteur aujourd’hui, c’est la promesse pour la très grande majorité d’être des professionnels précaires. Et c’est la certitude derrière cela d’en payer le prix durant la retraite. Cette précarité n’est pas l’apanage des créateurs. Elle se répand dans toute notre société au fur et à mesure que le salariat est remplacé par l’indépendance. Combien de millions de Français sont-ils condamnés au minimum vieillesse ? Il est vraiment urgent de penser une réforme des retraites qui permettra à toutes et tous de vieillir dans la dignité. Et pour cela de repenser un marché du travail qui permettra à toutes et tous de travailler et de cotiser dans la dignité.
L’ami Fred Beltran écrit sur Facebook qu’il doit se résoudre à se débarrasser de vieux Macintoshs pourtant acquis à prix d’or à l’époque. Que de souvenirs. En me remémorant le PowerMac qu’on avait acheté à deux avec Mathieu Lauffray, hors de prix pour de jeunes artistes débutants, j’ai donc commenté que ces ordinateurs « coûtaient un rein ». Mais certains me répondent que « ça n’a pas vraiment changé aujourd’hui ». Rien de moins sûr.
Sur la publicité d’époque, on peut voir le prix de la gamme des Macintoshs de 1994.
Si on convertit en euros les 20 000 Francs HT d’un PowerMac 7100, en tenant compte de l’inflation évidemment, on obtient presque 5 000 € HT / 6 000 € TTC d’aujourd’hui. Ce PowerMac 7100 de 1994 à 6 000 € a en gros comme équivalent dans la gamme aujourd’hui le Mac Mini M2 ”pro” à 1 500 €. C’est donc 4 fois moins cher. En performance, c’est évidemment sans comparaison.
Pour rappel, les tarifs du Mac Mini M2 de 2023 commencent à 700 € (et c’est déjà une sacrée bête de course à ce prix). Même le Mac Studio Ultra, horriblement cher, n’est « que » à 4 500 €.
Bref, les prix des PC comme des Mac se sont totalement effondrés en 30 ans à gamme égale. Et c’est vrai pour la plupart des appareils électroniques. Et ce sans tenir compte des prodigieux gains de performance obtenus entre temps. Et pourtant beaucoup continuent à les trouver bien trop chers.
On ne peut donc que recommander de comparer les prix dans le temps, car notre mémoire est très approximative sur ces sujets. Je pratique souvent cet exercice, et c’est plus surprenant qu’on ne l’imaginerait. Je le fais bien sûr aussi sur la rémunération des auteurs et autrices dans l’édition. Et croyez-moi, avec une vision de plus de 30 ans de recul sur les tarifs pratiqués, il y a de quoi avoir peur.
Pour faire des calculs des prix avec l’inflation mais aussi la conversion entre francs et euros entre les années :